Agriculture : le gouvernement espère clore la crise, la FNSEA salue une nouvelle phase
Le gouvernement a rendu publiques samedi des mesures "complémentaires" en faveur des agriculteurs, dans l'espoir de clore pour de bon la crise qui a provoqué des blocages exceptionnels au début de l'année, rencontrant un écho positif des syndicats majoritaires.
100 projets de stockage d’eau ou d’irrigation
“On travaille à des mesures concrètes pour nos agriculteurs”, a souligné Gabriel Attal lors d’une visite à Pirou, dans la Manche.
Parmi ces mesures figurent la présentation promise “début mai” de la version définitive du plan Ecophyto de réduction des pesticides, mis en pause à la faveur de la crise agricole, de nouvelles aides à la trésorerie des exploitations, l’accélération de 100 projets de stockage d’eau ou d’irrigation, et un plan d’aide à trois départements frappés par les crises météorologiques (Pyrénées-Orientales, Aude, Hérault).
Été 2024 : vote d’une nouvelle loi agricole
Après la mobilisation inédite des agriculteurs et d’intenses négociations de plusieurs mois, une nouvelle “phase” s’ouvre pour la “déclinaison concrète” de chacune de ces mesures, ont salué samedi les syndicats majoritaires, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs. Mais ils promettent d’être d’une “extrême vigilance” pour surveiller leur concrétisation, et le vote cet été d’une nouvelle loi agricole.
“Une crise ne se termine pas en claquant des doigts. Il faut que ruisselle dans les corps de ferme tout ce qui a été annoncé depuis des mois”, a lancé le secrétaire général adjoint de la FNSEA Christophe Chambon sur Franceinfo. À la Coordination rurale, “on sera vigilants sur toutes les annonces”, et “il y a encore beaucoup à faire”, a déclaré sa présidente Véronique Le Floc’h à l’AFP. “On nous donne le sentiment d’aller vite, mais beaucoup de mesures auraient pu être prises depuis le départ.”
Un rendez-vous avec Emmanuel Macron, promis depuis le Salon de l’agriculture en février, devrait permettre de sceller l’entrée dans une nouvelle phase, mais aucune date n’a été fixée.
Le gouvernement confirme en outre que la réforme des retraites agricoles, dont la mise en œuvre technique faisait débat, s’appliquera bien “dès 2026” sur les 25 meilleures années de carrière. Le Premier ministre Gabriel Attal s’est rendu ce samedi avec son ministre Marc Fesneau dans la Manche à Pirou où il a visité une “foire aux bulots” puis une exploitation maraîchère. “Ce n’est pas parce qu’il y a eu un mouvement de crise avec une mobilisation très forte qu’on n’est plus dans ce temps-là, que je vais lâcher le sujet”, a affirmé Gabriel Attal.
“On marche à la confiance”, a commenté le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, sur place, interrogé sur la probabilité d’une relance de la mobilisation agricole. “On ne veut pas rentrer dans un chantage réciproque” avec les syndicats, a-t-il dit.
Une nouvelle phase !
Après la crise agricole historique de cet hiver, ces mesures “permettent vraiment d’arriver à une réponse globale aux préoccupations exprimées par les agriculteurs et d’entrer dans une phase qui n’est plus celle de la mobilisation”, souligne-t-on de source gouvernementale. Même si une potentielle rencontre entre les syndicats agricoles et Emmanuel Macron “dépendra beaucoup de la réaction des différents syndicats à ce nouveau paquet”, ajoute-t-on.
Certains syndicats agricoles évoquent une possible rencontre avec le président le 2 mai, non confirmée à ce stade par l’Élysée. Les députés doivent également examiner dès lundi selon Matignon le projet de loi d’orientation agricole, remanié après la crise. Avec des sujets comme la formation, les haies ou la révision de l’échelle des peines en cas d’atteinte à la nature, il a pour objectif d’accélérer l’arrivée de nouvelles générations d’agriculteurs, délestés de certaines contraintes environnementales.
Gabriel Attal a reçu à plusieurs reprises les syndicats agricoles qui, le 19 mars, lui avaient exposé cinq “blocs” de priorités qui concernaient l’élevage, le stockage de l’eau et les pesticides, la “compétitivité”, la trésorerie et les retraites agricoles. Gouvernement et agriculteurs ont “convergé sur une nouvelle stratégie” du plan Ecophyto 2030 qui reprendra les engagements du gouvernement : le simplifier et se fonder désormais sur un indicateur européen, au lieu du français utilisé jusqu’à présent.
Ce changement de méthode est dénoncé par plusieurs ONG qui reprochent à l’indicateur européen de moins bien différencier la nocivité des pesticides. Le “conseil stratégique”, un diagnostic obligatoire des pratiques phytosanitaires de chaque exploitation, sera “supprimé dans sa forme actuelle” et le gouvernement s’engage à travailler à un “conseil réformé”.
Pyrénées-Orientales, Aude et Hérault
Pour la trésorerie des agriculteurs, la banque publique d’investissements BPI France apportera des financements nouveaux d’au moins 100 millions d’euros sous forme de prêts de trésorerie personnels (jusqu’à 75.000 euros) ou de garanties pour les prêts des banques privées. Le gouvernement prévoit aussi d’augmenter en cas de sinistre climatique ou sanitaire le taux de dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
À plus long terme, le gouvernement prévoit de lancer un plan “d’accompagnement” pour les agriculteurs des Pyrénées-Orientales, de l’Aude et d’Hérault, particulièrement touchés par la sécheresse, le gel ou les inondations, qui sera doté de 50 millions d’euros pour des projets d’adaptation au changement climatique et d’évolution des filières locales.
Le gouvernement s’est engagé aussi à accélérer 50 projets agricoles de stockage d’eau ou d’irrigation d’ici juin, et 50 autres d’ici la fin 2024. Des types de projets très contestés par les associations environnementales.