Entreprises — Baillargues

Baillargues : Hurricane réinvente le sport urbain, "un parc à la fois"

Quand on franchit les portes de Hurricane Group à Baillargues, dans l’Hérault, on n’entre pas seulement dans une entreprise, mais dans une ruche d’innovation. Là, entre le bruit des outils et les plans stratégiques, Hervé André-Benoît, le créateur du FISE (Festival International des Sports Extrêmes), incarne une vision : redéfinir l’univers des sports urbains.

La réutilisation, l’ADN d’Hurricane

“Avec 100 pièces de Lego, vous pouvez faire une voiture, un bateau ou une maison…” : quand le fondateur d’Hurricane parle de ses skateparks, c’est avec la fierté d’un enfant qui assemble un chef-d’œuvre. Sauf qu’ici, les briques ne sont pas en plastique, mais en bois et en métal, et elles servent à bâtir des skateparks, des BMX parks ou même des parcours de parkour, modulables à l’infini. Et cette modularité, c’est bien plus qu’un gadget. “Nous, on ne démolit rien.” Voilà une phrase qu’on aimerait entendre plus souvent dans le monde de la construction. Chez Hurricane, chaque module a une durée de vie de 4 à 8 ans et est conçu pour être démonté, transporté et remonté, encore et encore. “Quand on organise un événement, on démonte tout à la fin, on stocke, et on réutilise. Avec le stock qu’on a aujourd’hui, on pourrait créer 4 à 5 skateparks différents en même temps !”, promet-il. Ici, tout se transforme : les modules, les palettes de stockage, et même les racks qui servent à transporter le matériel : “On est presque à 100 % de réutilisation”.

La réutilisation, c’est aussi une question de coûts. “On est un peu les parents pauvres des sports : pas de droits télé, pas de budgets faramineux. Donc on optimise tout.” Résultat ? Hurricane possède son propre stock de barrières pour les événements, économisant sur les locations. Chaque module, chaque vis est pensé pour durer et être déplacé au moindre besoin. “Pour une collectivité, investir dans nos modules modulables, c’est éviter de figer un projet. Si, dans 5 ou 10 ans, la mairie veut réutiliser l’espace, on démonte et on remonte ailleurs. Pas besoin de tout jeter.”

Ce modèle quasi parfait a néanmoins ses limites… physiques. Avec une demande en pleine explosion, Hurricane se heurte à un problème très terre-à-terre : la place. “On cherche une surface de stockage depuis plus d’un an. Il nous faut à la fois du stockage intérieur et extérieur.” Et ce n’est pas qu’une question de stock. L’atelier de fabrication, petit mais efficace, commence lui aussi à montrer ses limites. Un projet de doublement de la capacité est en cours, mais comme le souligne Hervé André Benoît : “Le problème, c’est d’anticiper. La demande explose, et on doit être prêts à y répondre.”

Éduquer la demande

“C’était vide”, se rappelle le dirigeant, en parlant du marché des skateparks en France dans les années 2000. “Mais c’est ça la clé : créer la demande. L’événementiel joue un rôle essentiel.” Avec des événements comme le FISE, Hurricane a non seulement fait découvrir ces sports au public, mais a également convaincu les collectivités de l’importance de posséder des infrastructures. “Un skatepark devrait être aussi essentiel qu’un terrain de foot ou de basket”, affirme-t-il. En parallèle, Hurricane Park s’est attelé à anticiper les besoins : “On ne vend pas juste un parc. On réfléchit à une vision à long terme. Être complémentaire, penser évolutif.”

Pour Hervé André Benoît, la réussite repose sur une collaboration constante. “Il n’y a pas de petit budget. L’important, c’est de semer une graine et de l’arroser. Parfois, l’arbre pousse en deux ans, parfois en dix.” Ce mantra, ‘Stronger Together’ (“Plus fort ensemble”), se retrouve partout : dans le soutien aux clubs, l’organisation d’événements, ou encore la création d’associations locales pour animer les skateparks. Et impossible n’est pas Hurricane Park : “On intègre maintenant nos infrastructures dans des projets immobiliers. Une piste de VTT sur un toit ? Pourquoi pas !”.

La Chine, le nouvel eldorado

C’est une histoire d’opportunité et de timing. Quand Hurricane débarque en Chine il y a 11 ans, le marché est quasi inexistant pour les sports urbains. “On est arrivés à Chengdu, et là, rien. Mais en même temps, c’était un terrain vierge, et on connaît ça. On a commencé petit, comme en Europe il y a 27 ans“. La recette ? S’implanter, investir dans les infrastructures, et surtout populariser les sports. “Hurricane est leader en Chine, que ce soit en événements ou en infrastructures”, un exploit, d’autant plus que les Chinois ne font pas dans la demi-mesure : “Quand ils se lancent, ils investissent sérieusement. Et ça paye.” Aujourd’hui, la ville de Chengdu, dans la province du Sichuan, est devenue l’épicentre du développement du BMX et du skate en Chine. Ce n’est pas qu’une question d’événements : “On a créé des infrastructures, des académies, on a fait grandir la scène locale.” Résultat ? Le niveau chinois dans ces sports a explosé. Et, comme une cerise sur le gâteau, une médaille d’or en BMX féminin aux derniers JO vient couronner l’engouement. Et la Chine, avec sa politique de soutien aux infrastructures, fait bien plus que suivre la tendance : “Elle est en train de la mener !”.

Une route semée d’embûches

Mais la Chine, ce n’est pas le seul marché où Hurricane imagine s’impliquer. Les Etats-Unis et l’Afrique sont dans le viseur. En tout cas, dans un monde idéal, celui où les frontières seraient ouvertes et les réglementations plus simples. “Los Angeles, c’est un marché ultra-mature, mais avec des infrastructures vieillissantes. Le problème, c’est qu’il est quasiment impossible de s’y implanter en tant qu’entreprise européenne.” Pourquoi ? Parce que, comme l’explique le dirigeant, les règles protectionnistes aux Etats-Unis compliquent l’entrée des sociétés étrangères sur le marché. “Il faut soit une société américaine, soit un partenaire local pour espérer pénétrer ce marché.” Le projet Hurricane aux Etats-Unis est donc en gestation, mais à quel prix ? “C’est un million d’euros pour arriver sur Los Angeles. Et encore, si on y arrive.”

Quand le continent africain entre en scène, c’est un tout autre obstacle qui se met au travers de la route. : “Là, ça dépend de la volonté des autorités locales et des financements”, avance Hervé André Martin. Si la scène sportive ne bénéficie pas encore de l’infrastructure solide que l’on trouve en Chine ou aux Etats-Unis, elle ne manque pourtant pas de talents : “Hurricane, ayant déjà fait ses armes en Tunisie et au Maroc, ne manque pas de preuves du potentiel africain”. Mais, comme pour les autres marchés, tout reste une question de volonté politique et d’investissement local. Et tant que les sponsors ne se lanceront pas à fond, la croissance restera en pause.

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