Béziers : Mathilde Boulachin prend seule les rênes de la maison de négoce de vins sans alcool Pierre Chavin
Le spécialiste biterrois des vins sans alcool veut accroître ses parts de marché à l’international, et va construire un nouveau siège social.
Du changement à la tête de la maison de négoce viticole Pierre Chavin (Béziers). Mathilde Boulachin, fondatrice et dirigeante, devient la seule actionnaire, suite au rachat des titres de l’associé égalitaire sortant, Fabien Graus, qui quitte la structure. « Je deviens l’une des rares femmes françaises à la tête d’un négoce international dans le secteur viticole. J’ose lever de la dette pour piloter seule », explique Mathilde Boulachin, à l’issue de cette opération montée avec la Banque Populaire du Sud.
La maison de négoce de vins et boissons sans alcool réalise plus de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires et évolue dans 58 pays. Cap, à présent, sur les 15 M€ de CA en 2022, avec 70 pays ciblés, puis une centaine en 2025. Avec, en ligne de mire, les États-Unis, « où les opportunités sont colossales ».
Pour distribuer ses vins, Pierre Chavin travaille avec les gros importateurs, la grande distribution spécialisée, les travel retails (compagnies aériennes et maritimes, zones frontalières), la restauration, les monopoles d’État (Canada, Scandinavie), les réseaux de cavistes et le digital, via sa propre e-boutique, des spécialistes online et des marketplaces.
Architecte du goût
Désormais seule à la barre, Mathilde Boulachin, qui se qualifie d’« architecte du goût », entend poursuivre une croissance « à deux chiffres » et n’exclut pas d’éventuelles opérations de croissance externe. Elle vient de lancer un effervescent sans alcool premium, ‘Pierre Zéro Signature’, issu de raisins biologiques fermentés puis désalcoolisés. « L’ambition organoleptique de ce produit est de se rapprocher le plus possible d’un profil vineux. On a souvent reproché aux vins sans alcool d’avoir un goût trop différent de l’univers du vin. Nous avons recherché la complexité et l’élégance, et je me suis inspirée de mes origines champenoises, ajoute la dirigeante. Plusieurs éléments ont motivé cette sortie : la quête de sens, la recherche de bienfaits nutritifs, la vigilance de l’apport calorifique, le besoin de naturel sans additifs. » Ce vin passe la porte des restaurants étoilés et des hôtels 5 étoiles. « Il se vend comme de grands vins, principalement à l’étranger. C’est une vraie surprise. »
La femme d’affaires insiste sur l’importance de la RSE – vins transportés par trains, arbres plantés à Haïti et au Pérou, étiquettes à partir de résidus de production de canne à sucre… « Le consommateur veut pouvoir agir de façon citoyenne par son achat. Il a besoin de véracité, de sens et de pertinence, d’une histoire. »
Adaptation aux différents marchés
Pierre Chavin consulte les consommateurs, organise des panels de dégustation et scrute leurs avis sur les sites Internet, pour adapter ses vins aux différents marchés. « Par exemple, le consommateur asiatique n’apprécie pas le côté tanique, car il mange plutôt épicé. Et le consommateur nord-américain va, lui, plutôt chercher des complexités. Il n’y a pas de consommateur typique. Le Coca-Cola du vin n’existe pas ! », sourit-elle. L’univers des vins sans alcool est, d’après elle, « un boulevard en termes de R&D : recherche de vieillissements, nouvelles formulations, assemblages… »
La PME, qui emploie une quinzaine de collaborateurs, dont 2 œnologues, a été fondée en 2010. Plus de dix ans après, la société va être rebaptisée Chavin. « Pierre était une référence au terroir. Nous n’avons plus besoin de cette caution, car nous avons pris de la puissance. » La nouvelle identité visuelle sera dévoilée le 14 février sur le salon Wine Paris. Sans plus attendre, la marque a eu les honneurs du New York Times, le 20 décembre, dans un article titré « Rosés sans alcool pour les célébrations ».
Un nouveau siège social en 2023
Chavin est sur le point de finaliser son projet de nouveau siège social à Béziers. Cette construction neuve sera livrée fin 2023. L’idée générale est de « rationaliser la logistique, créer un centre de R&D (laboratoire et essais), et en faire un lieu attractif pour accueillir des clients étrangers et véhiculer une meilleure image, pour attirer des talents dans le marketing, le digital et les fonctions commerciales », confie cette globe-trotteuse. Ayant longtemps travaillé en Suède, elle estime que sa concurrence n’est pas en France, « mais en Afrique du Sud, en Californie, au Chili… »