Cabanisation : "L'Etat vous retrouvera", depuis les gravats d'une villa au Bosc, le préfet hausse le ton
C’est au bout d’un sentier de ruffes rouges et de roches, bordé d’une végétation dense, à hauteur de la commune du Bosc, dans le Lodévois, que se situe la propriété visée par l’opération de lutte contre la cabanisation, ce jeudi matin.
Un portail imposant, des barrières soignées, une végétation parfaitement entretenue… Rien ne laisse supposer que le propriétaire de ce terrain s’est installé ici en toute illégalité. Voilà près de vingt ans que l’État tente de régulariser cette situation. Entre-temps, ce dernier s’est confortablement établi sur plusieurs hectares : un âne, un cheval, une table de ping-pong, et une villa de plus de 120 mètres carrés.
Un feuilleton de 20 ans
Pour le maire du Bosc, Jérôme Valat, la présence de cette habitation illégale n’a rien d’une surprise : “C’est la fin d’une longue procédure qui a même été portée jusqu’à la cour de cassation ! Un combat de longue haleine… Quand j’ai repris la mairie, cette histoire était déjà bien entamée. J’ai d’ailleurs vu plusieurs fois le propriétaire, qui savait très bien que cette histoire finirait en démolition.” Mais alors comment expliquer une telle lenteur du calendrier ? Parce que “nous vivons dans un état de droits” : le propriétaire a fait tout ce qu’il pouvait pour défendre son dossier. Mais au bout du compte, “la loi a fini par l’emporter”.
Quelques questions demeurent, et une procédure semble ouverte pour faire le clair sur certains point d’ombres : “Les précédentes mairies n’ont pas fait les démarches qu’il fallait, et c’est pour ça qu’on en est là, dénonce Jérôme Valat. Avant d’arriver là, il y a eu des demandes d’urbanisme qui posent question. Je ne peux pas en dire plus, car je reste dans le secret de la procédure, mais il y a beaucoup de zones d’ombre. On n’arrive pas à ce point-là par hasard.”
Le propriétaire devra maintenant régler la facture : 50 000 euros pour la destruction, et 100 000 euros d’astreintes administratives, que l’État compte bien récupérer. “C’est un message clair à ceux qui pensent qu’ils peuvent faire n’importe quoi : vous construisez sans permis, vous payez pour ça”, pointe François-Xavier Lauch, le préfet de l’Hérault, présent lors de la démolition.Et le représentant de l’État n’a pas mâché ses mots : “Ce terrain était impeccablement clôturé, comme une forteresse autour d’une belle maison. C’est dur à croire, mais certains croient vraiment qu’ils peuvent tout se permettre parce qu’ils achètent un terrain. Eh bien non, ici, ce n’est pas le Far West. C’est la France, et la loi s’applique à tout le monde.”
La lutte contre la cabanisation, “une priorité”
L’histoire de la maison du Bosc ne s’inscrit pas dans un cas isolé, loin de là. La cabanisation, qualifiée de “plaie du département” par les autorités, touche l’ensemble de l’Hérault. “On recense aujourd’hui plus de 30 000 constructions illégales, et ce chiffre ne cesse de croître”, rappelle le préfet.
Face à cette réalité, il insiste : “Pour moi, cette lutte contre la cabanisation, c’est une priorité absolue. Ce problème existe depuis 50 ans dans le département, mais il prend une ampleur vertigineuse. L’État agit. C’est une question de respect des règles et de justice.”
Chaque année, près de 200 verbalisations sont émises pour des constructions illégales, et un quart d’entre elles débouchent sur des arrêtés interruptifs de travaux, souvent pris par les maires. “Nous travaillons avec 60 maires, dont 10 qui font face à des problèmes particulièrement graves. Nous ne laissons pas faire, mais il faut du temps. Nous en sommes à une centaine de décisions judiciaires par an, qui mènent à des destructions comme celle que nous avons vue ce matin”, précise le préfet.
Et même s’il admet que les démarches sont longues et parfois fastidieuses, il est convaincu que “les responsables doivent payer” et fait une promesse : “L’État a une mémoire très longue.” Pour corriger l’affront à la loi, toutes les méthodes sont utilisées : ponction sur les salaires, saisie et vente du terrain… “Les gens qui construisent sans permis finiront par regretter amèrement leur décision.” Le ton est donné.