Santé — Région occitanie

Occitanie : en panne de médecins traitants, des praticiens s'organisent à Carcassonne

A l'ombre des remparts de Carcassonne, où le nombre de généralistes connaît un déclin sans fin, des praticiens ont uni leurs forces pour prendre en charge depuis un an les patients les plus lourdement malades et privés de médecin traitant.

“Un des tout premiers patients qu’on a eu, quand on lui a donné un rendez-vous, il nous a dit +Vous m’avez sauvé la vie, ça faisait des mois que j’appelais partout, je n’avais pas de médecin traitant, j’allais abandonner”, se souvient Sandrine Duval, assistante médicale. Elle travaille depuis un peu plus d’un an au “Dispositif ambulatoire libéral innovant d’accès aux soins” de Carcassonne, joliment surnommé Dalia.

“Ce qui nous différencie des autres centres médicaux classiques, c’est que nous sommes inscrits dans le suivi des patients en affection longue durée (ALD)”, indique Laurianne Farges, “infirmière en pratique avancée” (IPA, c’est-à-dire plus expérimentée et avec un diplôme lui conférant plus de compétences) au sein du dispositif inauguré à l’été 2023.

“Désastre sanitaire”

En France, plus de 700 000 personnes souffrent de ce type de pathologies chroniques et n’ont pas de médecin traitant, selon les chiffres de l’Assurance maladie. Et à Carcassonne où le nombre de praticiens est en chute libre, certains professionnels ont rapidement réalisé qu’“on allaitait au devant d’un désastre sanitaire”, résume Erik Bravo, médecin à la tête de l’association qui porte Dalia.

Quelques mois avant son lancement, le nombre des médecins actifs localement avait été divisé par deux, selon les autorités sanitaires. “On est désormais à 25, ils ne sont pas tous à temps plein et deux sur trois ont plus de 60 ans”, explique le docteur Bravo, ajoutant : “Il allait vraiment y avoir un problème […] avec des gens dans la nature” et “aucune perspective d’amélioration à court terme”.

Professionnels et acteurs publics se mettent alors autour de la table et s’inspirent d’un premier Dalia né à Graulhet (12 000 habitants), dans le Tarn voisin, pour transposer le modèle à l’agglomération carcassonnaise et ses plus de 110 000 habitants.

Sept médecins rentrent dans le projet pour se relayer et assurer l’équivalent d’un mi-temps, alors que la plupart des patients sont formulés par d’autres professionnels, pharmaciens ou infirmiers. “Sans médecin, c’est bien embêtant, aux urgences on ne va pas y aller pour encombrer, c’est déjà assez encombré comme ça”, explique à l’AFP Jacqueline, venue accompagner sa mère et sa belle-mère, et désormais habituée au dispositif. “Quand je viens, je fais un convoi”, sourit-elle.

“Avoir le temps” –

Après une pré-consultation réalisée par une assistante médicale, l’une se rend dans le bureau de l’IPA tandis que l’autre a rendez-vous avec le Dr Anne Mandonnaud, qui officie tous les lundis après-midi. “Si le patient est stable dans ses pathologies, qu’il n’y a rien de particulier, il est suivi par l’IPA trois fois, et une fois par an, on les revoit pour faire le point”, indique à l’ AFP la praticienne dont le cabinet principal se trouve à une vingtaine de minutes de route.

L'extérieur du centre médical Dalia à Carcassonne, le 15 octobre 2024 © Ed Jones / AFP.
L’extérieur du centre médical Dalia à Carcassonne, le 15 octobre 2024 © Ed Jones / AFP.

Attentionnée, elle prend le temps d’ausculter Lucienne, 90 ans, mais aussi d’échanger avec elle sur son moral et son état de santé psychologique. “Savoir qu’on a le temps est un luxe énorme”, souligne la médecin. La nonagénaire audoise aux cheveux blancs coupés courts fait partie des plus de 800 patients désormais suivis par Dalia. Et ses acteurs aimeraient en accueillir plus, en attirant par exemple de jeunes médecins, voire des internes. “Pour eux, c’est une activité intéressante, c’est formateur puisqu’on ne voit que des maladies chroniques, ils ne seraient pas tout seuls et seraient aidés par l’équipe”, estime le Dr Mandonnaud.

Le succès de la structure, devenu un acteur incontournable de l’offre de soins à Carcassonne, comme dans le Tarn, inspire en tout cas dans une région confrontée à la désertification médicale : Dalia a ainsi vu le jour dans le village de Belmont-sur-Rance (Aveyron) en septembre et des projets essaiment dans trois autres départements occitans.

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