Crise de l'immobilier : faut-il revoir les fondations ?
[EDITO] Une crise en cache souvent une autre. Après le COVID, c’est celle de l’immobilier et plus encore du logement qui s’est intensifiée.
Dans son 29e rapport sur l’état du mal-logement en France 2024, la Fondation Abbé Pierre met en avant 330 000 personnes sans domicile (143 000 en 2012). Et ceux qui ont un toit doivent encore échapper aux problématiques d’habitat indigne. La Fondation recense ainsi “600 000 logements privés indignes” en France, précisant par ailleurs que “seuls 13 752 arrêtés d’insalubrité sont en vigueur en 2021”.
Le département de l’Hérault n’est pas épargné par la problématique. Fin 2022, “deux propriétaires ont été condamnés à une sanction administrative par le préfet de l’Hérault pour non-respect de l’obligation de demander un permis de louer avant de contracter un bail, alors même que ces habitations présentaient des dysfonctionnements susceptibles de porter atteinte à la santé et à la sécurité des occupants”. En novembre 2023, la Fondation Abbé Pierre se portait partie civile, aux côtés de la ville de Montpellier et de l’association Habiter Mieux, dans le procès contre des anciens propriétaires de la résidence Font del Rey à Montpellier. Les propriétaires ont été reconnus coupables de loger des personnes vulnérables dans des conditions déplorables et ont été condamnés à des peines allant de 6 à 12 mois de prison avec sursis et des amendes jusqu’à 50 000 euros.
Une justice sociale rendue possible par des avancées locales. Notamment par la mise en place d’un permis de louer à Montpellier, dans le quartier de Celleneuve, puis à Figuerolles. Le dispositif de mise en location suppose ainsi une autorisation préalable, soumise à un diagnostic obligatoire et à une visite de contrôle. Le tout, piloté par le service communal d’hygiène et de santé (SCHS).
Du côté de l’offre, le Manifeste présenté par l’ABCD (Académie du Bâtiment et de la Cité de Demain met en avant une “crise de production de logements”. André Deljarry, président de la CCI, précise : “nous allons produire dans les deux ans à venir 870 logements, mais ce n’est pas suffisant, il en manque 2000”. La solution pour Philippe Roussel, président de l’UNAM LR ? “ il faut déclarer le logement d’intérêt général majeur !”. Pour le sénateur Jean-Pierre Grand, il faut “un grand plan national d’accès à la propriété pour les jeunes”. Et pour cause, d’après Socialter : 45 % des multi-propriétaires en 2021 ont plus de 60 ans, 70 % plus de 50 ans. Parallèlement, le taux moyen pour un crédit immobilier a bondi de 0,99 % en décembre 2021 à 4,19 % en octobre 2023.
Plus qu’une facilitation de l’emprunt, une politique fiscale adaptée au niveau local est nécessaire, comme le souligne Alain Guiraudon, cofondateur du groupe GGL. “Pourquoi ne donnons-nous pas aux élus locaux la capacité d’adapter rue par rue le type de logement qui bénéficiera de l’avantage fiscal ? Cette approche donnerait la possibilité d’adapter la sociologie des quartiers, de concevoir de véritables foyers pour les familles”.
Cette édition, à travers les interventions de ces acteurs institutionnels et privés qui façonnent le logement dans l’Hérault, sera l’occasion de saisir, derrière les chiffres, la réalité sociale qui entoure la question du logement, les liens entre politiques publiques et aménageurs privés. Car pour Alain Guiraudon, le logement est forcément affaire de politique quand on agit sur “ un enjeu qui est majeur : loger les gens, riches comme pauvres”.
- Alain Guiraudon (GGL) : « Les questions posées au niveau national ont du sens, mais la nuance fait défaut »
- GGL x Pics Studio : la nouvelle saga de l’Hérault
- CCI, élus, professionnels : quid face à la crise de production de logements ?
- André Deljarry : « Ce qui me motive, c’est notre action visant à dynamiser le commerce et l’économie du territoire à travers un événement comme celui-ci »
- Frédéric Sabatier : « Il faut composer sa propre destinée »