Des maires héraultais aussi fatigués que "très en colère"
Le 106e Congrès des maires de France s’ouvre ce mardi 19 novembre à Paris dans un climat tendu. Dans un contexte de baisse des dotations de l’État, le projet de loi des finances inquiète les maires sommés de faire un effort pour éponger la dette publique. Alors que beaucoup sont déjà assommés par une fonction qui se mue de plus en plus en sacerdoce.
Les maires montent au 106e Congrès des maires comme on monte au créneau. “Nous allons nous rassembler devant le congrès, le premier jour, avec nos écharpes tricolores pour dire notre mécontentement“, annonce le maire de la petite commune de Combaillaux, Daniel Floutard. Les tensions entre les élus locaux et le gouvernement concernent principalement les mesures d’économie demandées aux collectivités territoriales. “Il y a 5 milliards d’économies de prévu sur notre dos, se désole le maire de Vendargues, Guy Lauret. Je trouve cela injuste. Tout le monde doit faire des efforts mais les communes votent des budgets à l’équilibre et assurent 60% des investissements publics. Et elles sont endettées à hauteur de 200 milliards, ce qui représente “seulement” 8 % des 3 228 milliards de la dette publique.”
“On veut nous imputer une part du déficit”
“On est très en colère car on veut nous imputer une part du déficit de l’État, poursuit Frédéric Roig, maire de Pégairolles-de-l’Escalette et président de l’Association des maires de l’Hérault (AMF 34), depuis un taxi en route vers le congrès national à Paris où environ 150 communes de l’Hérault seront représentées. “Ce n’est pas acceptable. Surtout quand on voit l’ensemble des compétences et des missions pour lesquelles elles doivent se substituer à un certain nombre de désengagements ou de déficit de l’action publique portée par l’État.” En somme, “l’avenir s’annonce très, très sombre. Cela va être de plus en plus difficile de gérer un budget”, estime Michelle Cassar, depuis sa mairie de Pignan (8 221 habitants).
Une lenteur administrative pesante
En effet, depuis la crise du Covid, les frais de fonctionnement ont grimpé en flèche et pèsent de plus en plus lourds sur les finances des collectivités, notamment à cause de l’augmentation des prix de l’électricité et du gaz. “A titre d’exemple, nous payions autrefois 8 000 € pour chauffer notre halle des sports ; nous en sommes à 32 000 € aujourd’hui pour deux degrés de moins”, confie le maire de Ganges (3 884 habitants), Michel Fratissier.
Ainsi, l’annonce d’une baisse des dotations vient achever une fonction déjà mal en point. “Il y a de moins en moins d’argent public, on nous transfère des compétences qui coûtent – sans forcément les recettes qui vont avec – et on est accablés par les directives, les normes, les circulaires… Tous les ans, on nous en rajoute une couche“, témoigne l’édile de Combaillaux. “C’est un mandat qui devient de plus en plus difficile. On disait que c’était le mandat en or, proche des citoyens, mais il faut aujourd’hui plus d’un mandat pour sortir un projet à cause de la lenteur des procédures. Il faudra que l’État agisse sur cette question, cela devient très fatigants“, explique M. Fratissier, qui ne se représentera pas en 2026.
83 % des maires estiment que leur santé est affectée
Une situation plus qu’inconfortable pour les maires, d’ici comme ailleurs en France. À tel point que 83 % d’entre eux estiment que leur santé physique ou mentale est affectée par leur mandat, selon une enquête commandée par l’AMF (Association des maires de France) menée auprès de 5 000 d’entre eux (sur 35 000 élus) réalisée par le Centre de sociologie des organisations (CSO). L’AMF 34 s’est d’ailleurs emparée du sujet et commandée une enquête à l’Observatoire Amarok, basée à Montpellier, afin “de regarder de manière plus précise comment se traduit ce mal-être au niveau du département, indique Frédéric Roig. Les conclusions devraient être données à la fin du mois de novembre mais la tendance, “d’après les réponses que l’on est en train d’étudier, confirme effectivement les préoccupations nationales”, dit-il.
“C’est une question de passion”
Ces données sont, toutefois à relativiser, sachant que 69,3% des maires affichent tout de même une satisfaction en tant qu’élu, selon l’Observatoire Amarok , à deux ans des prochaines élections municipales. “C’est une question de passion”, analyse Michelle Cassar, en place depuis trois mandats, qui constate cependant que “beaucoup de ses homologues, de la Métropole de Montpellier ou de petits communes de l’Hérault, parlent déjà de ne pas repartir en 2026”.
Un pourcentage qui pourrait évoluer après l’atterrissage du projet de loi des finances, actuellement étudiée au Sénat. “Peut-être que l’effort demandé aux collectivités sera moindre au final. Dans quelques semaines, on aura plus d’éléments de certitude. Quand la loi sera adoptée, on verra effectivement quels sont les contenus”, conclut Frédéric Roig. Une attente prompt à renforcer l’inquiétude déjà forte des milliers de maires attendus au 106e Congrès des maires de France.