Gustave Moreau, un symboliste tenté par l’abstraction ? (Paris, Musée Gustave-Moreau)
La question taraude les spécialistes et restera une énigme. A côté des nombreuses œuvres purement symbolistes de Gustave Moreau, le peintre a légué à l’Etat français des œuvres non figuratives. D’abord prises pour des « ébauches » et titrées ainsi, elles ont ensuite été réévaluées comme « abstraites ». Mais la communauté scientifique n’est toujours pas unanime les concernant. Le musée national Gustave-Moreau a choisi de les présenter de nouveau au public en ce début de XXIe siècle, afin qu’il se fasse sa propre opinion, ou pour qu’il en goûte les qualités intrinsèques, par pur amour de la peinture et de la matière…
Une centaine de peintures et aquarelles, dont certaines inédites, composent l’exposition, à voir dans la galerie du premier étage et dans les ateliers des deuxième et troisième étages.
Parcours de vie
Né en 1926, Gustave Moreau suit les enseignements de l’École nationale supérieure des beaux-arts mais échoue par deux fois au prix de Rome. Symboliste, pratiquant une peinture empreinte de mysticisme, le peintre livre des œuvres marquées par la spiritualité, la mythologie et l’orientalisme. Peintre d’histoire, il expose notamment 11 œuvres à l’Exposition universelle de Paris en 1878, et deux à celle de 1889. Répondant à une commande, il illustre également à l’aquarelle les Fables de La Fontaine. A compter de 1892, il enseigne, à l’Ecole des beaux-arts de Paris, à Henri Matisse, Albert Marquet, Georges Rouault, Louis Valtat, Henri Manguin et Charles Camoin, entre autres… En 1895, il entreprend de faire transformer sa maison-atelier en musée, afin de léguer celui-ci à l’Etat après sa mort. En 1898, Gustave Moreau s’éteint…
Vers le songe et l’abstrait
L’exposition Gustave Moreau. Vers le songe et l’abstrait est composée de 7 sections. Tout d’abord, la technique du peintre est expliquée au travers du tableau Le Triomphe d’Alexandre : c’est la couleur qui construit et structure la composition d’ensemble ; le dessin définissant plus tard les motifs.
Puis l’on découvre que pour Gustave Moreau, la tache fait sens : ses essais de couleur sont présentés dans la deuxième section. Viennent ensuite des peintures sur carton bleu inédites. Et ce que certains critiques ont pu envisager comme les prémices d’une œuvre aboutie. Notamment l’huile sur bois La Vision, non datée, où les couleurs prédominent, et où seuls un personnage et une croix sont plus ou moins figuratifs. La cinquième section montre la façon dont Gustave Moreau élabore ses paysages, en utilisant très peu de couleurs différentes, et en créant un contraste entre deux masses colorées pour représenter le ciel et des rochers. Même chose dans la section suivante pour figurer une fenêtre dans un intérieur : un rectangle blanc s’intègre alors dans un ensemble foncé.
Les visiteurs passent ensuite à la partie la plus passionnante, celle qui conduit réellement à s’interroger. Sans qu’aucune réponse n’existe. La septième et dernière section explore « les merveilleux effets de la pure plastique ». Ces fameuses huiles sur toiles qui furent d’abord qualifiées d’ébauches, avant d’être vues comme abstraites. Sont-elles uniquement le fruit d’expérimentations ? Le peintre avait-il le souhait d’orienter son style vers ce type de peintures ? Ou n’étaient-elles que des étapes préalables ? Toujours est-il qu’elles confirment le grand talent de coloriste de Gustave Moreau et son plaisir infini à faire danser les couleurs…
Une exposition consacrée au grand Gustave Moreau dans son musée ! Courez-y !
Informations pratiques
Musée national Gustave-Moreau
14, rue de la Rochefoucauld – 75009 Paris
Tél. : 01 48 74 38 50.
www.musee-moreau.fr
> L’exposition Gustave Moreau. Vers le songe et l’abstrait est visible tous les jours sauf le mardi de 10h à 17h15, jusqu’au 21 janvier 2019.
> Entrée plein tarif : 7 €.