Hérault : “La mortalité liée à la pollution est 45% plus élevée dans les populations défavorisées”
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), “environ 7 millions de personnes meurent chaque année dans le monde à cause de l’exposition à la pollution de l’air.” . Conscient de cette problématique, l’observatoire de la qualité de l’air Atmo Occitanie a réalisé une étude approfondie dans l’agglomération montpelliéraine.
En France, la pollution atmosphérique se classe au deuxième rang des causes de décès évitables, juste derrière le tabac et devant l’alcool, avec environ 40 000 décès attribués chaque année à ses effets. Elle serait responsable de 9 % des décès dus à des maladies coronariennes et de 12 % des AVC. Des chiffres alarmants que Dominique Tilak, directrice générale d’Atmo Occitanie, résume par une donnée significative : “une réduction d’un microgramme par mètre cube des niveaux de PM2.5 pourrait entraîner une diminution de 3 % de la mortalité globale.”
7e ville de France, Montpellier méritait que l’observatoire s’attarde sur l’impact de la pollution de son air dans son aire. Ainsi, l’Atmo Occitanie s’est penchée sur la période de 2009 à 2019, examinant 115 communes autour de la métropole pour établir un lien entre la concentration de polluants et les événements de santé.
Des inégalités face à la pollution
“Chacun a le droit de respirer un air qui ne nuise pas à sa santé” : et oui, figurez-vous que depuis 1996 et la loi sur l’air, chacun de nous a droit à l’air pur ! Pourtant, dans son rapport, l’Atmo Occitanie met en évidence des inégalités préoccupantes. D’après leurs relevés, la mortalité liée à la pollution est 45 % plus élevée parmi les populations défavorisées par rapport à celles qui le sont moins. “Les concentrations de particules fines et la mortalité associée sont systématiquement corrélées au niveau de défavorisation sociale”, confirme l’Atmo. Par exemple, en 2009, la mortalité due aux particules fines était 50 % plus élevée chez les plus défavorisés par rapport aux populations moins défavorisées, un écart qui s’est maintenu à 45 % en 2019.
Une étude menée par le Centre Régional d’Études et d’Informations pour la Santé et le Handicap révèle un “gradient de concentration” de la pollution entre les groupes socio-économiques : les plus défavorisés sont exposés à des niveaux de PM2.5 supérieurs de 18 % à ceux des populations mieux loties. La raison ? “Des conditions de vie plus difficiles – qu’il s’agisse de travail, de logement, d’accès aux soins ou d’alimentation – et des lieux de vie principalement situés sur des aires de forte concentration urbaine”, avance le médecin, ajoutant que “malgré une baisse générale de la pollution, ce gradient reste malheureusement stable.”
“De nouveaux cas d’asthme pourraient être évités”
En France, environ 4,5 millions d’enfants en France souffrant d’asthme, aggravé par l’exposition aux PM2.5 et au dioxyde d’azote (NO2). Selon l’Inserm, “les enfants exposés à une pollution élevée sont plus susceptibles de développer des symptômes respiratoires”, une affirmation appuyée par des études qui pointent que la pollution de l’air est responsable d’une augmentation de 20 % des cas d’asthme chez les enfants.
Si la situation reste préoccupante, le rapport de l’Atmo Occitanie indique que dans l’aire montpelliéraine, des progrès notables ont été réalisés dans la réduction des indicateurs de morbidité liés aux particules fines (PM2.5), particulièrement chez les jeunes. En 2009, on enregistrait 608 cas d’asthme par an pour 100 000 habitants. Dix ans plus tard, ils n’étaient plus que 347 cas, soit une baisse de 43 % directement corrélée à la diminution des concentrations de pollution.
Mais il est toujours possible de faire mieux. Si les recommandations de l’OMS (5 µg/m³) étaient respectées, environ 347 nouveaux cas d’asthme pourraient être évités chaque année pour 100 000 habitants. “Chez cette population pédiatrique, qui est vulnérable, c’est vraiment une baisse drastique que l’on pourrait observer grâce à l’amélioration de la qualité de l’air”, avance le docteur Patrice Poinat.
Une amélioration, mais un long chemin à parcourir
Entre 2009 et 2019, des efforts significatifs ont été réalisés dans l’aire montpelliéraine pour réduire la pollution atmosphérique. Les concentrations de PM2.5 ont diminué de 16 %, entraînant une baisse de 19 % des décès attribuables à ces particules chez les personnes de plus de 30 ans, ainsi qu’une réduction de 43 % des cas d’asthme chez les jeunes. Néanmoins, des disparités géographiques et sociales persistent. Certains territoires continuent d’afficher des niveaux de pollution alarmants, rendant difficile le respect des seuils recommandés par l’OMS. “Réduire de 40 à 30 est plus simple que de passer de 20 à 15”, reconnait l’observatoire.
Pour faire face à ces défis, un nouveau Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA) est en cours d’élaboration pour le Grand Montpellier. Prévu pour entrer en vigueur en 2025, ce PPA devrait chapeauter la mise en place d’actions concrètes pour réduire la pollution aux niveaux recommandés par l’OMS. Il comprendra des mesures clés telles que la modélisation de la dispersion des polluants pour mieux comprendre leur propagation, un inventaire des sources de pollution pour cibler les actions, ainsi que la sensibilisation du public aux risques associés à la pollution de l’air. Car pour Dominique Tilak, une chose est sûre : “L’éducation et la sensibilisation du public seront cruciales pour réduire l’impact de la pollution de l’air sur notre santé”.
*Pour établir une comparaison pertinente entre les années, les indicateurs de mortalité et de morbidité liés à la pollution de l’air sont exprimés pour 100 000 habitants.