Hérault : la Chambre de commerce et de l’industrie met les sénateurs face aux défis économiques de demain
Le président de la CCI de l’Hérault André Deljarry a souhaité rencontrer les sénateurs du département pour exposer les sujets majeurs sur lesquels il attend des prises de positions. Si un consensus se dessine sur les axes de travail pointés par la CCI, les blocages liés au foncier et aux mobilités calment les ardeurs.
Les législatives approchent. Le président de la Chambre de commerce et de l’industrie (CCI) de l’Hérault André Deljarry a envoyé un courrier aux 115 candidats des 9 circonscriptions du département. Les futurs députés y trouveront des propositions, des constats, des résultats sur les actions déjà menées, un diagnostic des mutations en cours, mais surtout des objectifs et une évaluation des moyens nécessaires pour les réaliser. Les 9 députés de l’Hérault seront reçus par André Deljarry après le 20 juin, lendemain du second tour des élections législatives. En attendant, c’est à 3 des 4 sénateurs de l’Hérault – Jean-Pierre Grand, Henri Cabanel et Hussein Bourgi – que le président de la CCI a présenté sa feuille de route.
Les 5 priorités
La CCI est chargée de faire la lumière sur les enjeux économiques afin de permettre aux élus d’orienter leurs choix politiques. André Deljarry a exposé les 5 sujets qui, selon lui, pèseront sur l’avenir du département : “la compétitivité de l’économie et la réindustrialisation de nos territoires, la nécessité d’améliorer l’orientation des compétences, l’exigence d’être leader sur les transitions écologique et numérique, l’international, et la revitalisation commerciale de nos centres-villes”.
Point formation
Ces choix sont déterminés par 2 boussoles rappelées par André Deljarry : “la performance et la proximité”. La CCI de l’Hérault affiche un bilan flatteur avec un très bon taux de créations d’entreprises et d’emplois. L’apprentissage, notamment, est une réussite d’après André Deljarry, qui ne tarit pas d’éloges sur les CFA : “Il n’y a pas un apprenti à Montpellier, Béziers et Sète qui ne trouve pas un emploi”. 1 500 jeunes ont été formés en 2021. Un sujet d’autant plus actuel que de nombreuses branches subissent une pénurie de main-d’œuvre. Un problème qui ne se résoudra qu’avec la formation.
Si André Deljarry se félicite de la prolongation des aides pour l’apprentissage en 2022 après avoir enregistré une hausse de 20 % d’apprentis en 2021, le président met les élus en garde : “Je me tourne vers les sénateurs et je me tournerai vers les députés à partir du 20 juin en leur disant qu’il faudra continuer après”. L’effort devra être relayé et soutenu par les parlementaires.
Commerce de proximité
Les commerçants ont bénéficié à une époque d’une aide, le Fisac, qui leur permettait de procéder à des rénovations. Ce programme a été interrompu en 2018. André Deljarry veut remettre le sujet sur la table et demande aux élus de “porter ce besoin des commerçants auprès des plus hautes instances”. Il suggère aux sénateurs de proposer le département de l’Hérault comme territoire pilote pour des investissements du même type. Un programme qui couvrira les 342 communes de l’Hérault. Aujourd’hui, les opérations Cœur de ville et Petites villes de demain qui vont dans ce sens ne concernent que quelques communes.
“Facilitateur”
“La réindustrialisation passera par la mobilisation de fonds publics”, assure André Deljarry. Il souhaite notamment voir se développer les plateformes technologiques partagées à disposition des TPE-PME, tout comme l’accompagnement des donneurs d’ordre. Car la CCI est un “facilitateur de territoire”, selon son président. Pour illustrer son propos, André Deljarry rappelle qu’il a voulu réunir “tous les industriels dans le salon Intersud”. Il a demandé à ceux qui venaient du côté de Toulouse “de regarder ce qui se fabriquait ici. Car certains industriels vont chercher leurs pièces à l’autre bout du monde alors qu’on usine très bien dans notre territoire. 3 millions d’euros de commandes ont été réalisés sur ce salon”, conclut le président de la CCI.
Les métiers de demain
Avec l’exemple de Genvia (hydrogène décarboné), de l’économie bleue et de la Med Vallée (pôle de santé globale), André Deljarry envisage un avenir prometteur pour la création d’emplois. Il n’oublie pas le monde rural avec la viticulture et Chrono Viti, qui permet de développer le colis livré pour l’œnotourisme, et dont le chiffre d’affaires est passé de 100 000 à 300 000 euros en 2021 et pourrait atteindre 1 million d’euros à terme. Pour autant, la CCI engage les TPE et PME à tenter le commerce à l’international. Beaucoup d’entreprises ignorent leur potentiel pour ce marché, à en croire André Deljarry.
Sénateurs : oui, mais…
La grimace des sénateurs après l’allocution d’André Deljarry n’est pas une réaction à ses propositions. Ils reconnaissent la capacité de la CCI à éclairer leurs décisions politiques. “J’adhère sans difficulté”, concède Jean-Pierre Grand. Mais à la question de savoir “comment faire venir une entreprise à Montpellier et dans la Métropole, je n’ai pas la réponse” lance-t-il. Pour les 3 sénateurs présents, les questions du foncier et des mobilités sont les mamelles du développement économique de l’Hérault. Sans elles, l’accueil de nouvelles entreprises est compromis. Car il n’y a plus ou presque plus de terrains pour construire de nouvelles entreprises, pas de logement pour accompagner l’arrivée des nouvelles populations, qui auraient en plus besoin d’écoles pour leurs enfants, etc.
Obstacle ou garde-fou ?
Où trouver des terres ? “Doit-on garder toutes les vignes dans le centre urbain dense ? Oui, certaines, mais il faut aussi trouver d’autres extensions viticoles dans le département” suggère Jean-Pierre Grand. “La loi ZAN (zéro artificialisation nette) pose problème, enchaîne le sénateur de la ruralité Henri Cabanel. Macron devait s’occuper du problème foncier. Il faut que cela revienne dans le débat. Tous les territoires doivent être irrigués. L’économie se situe presque uniquement dans le sud du département”. André Deljarry confirme : “La loi ZAN doit être étalée dans le temps”.
Le sénateur Hussein Bourgi ajoute : “Il nous faut développer des mobilités terrestres et envisager l’installation d’entreprises sur le Parc régional d’activités économiques du Bosc, près de Lodève, ou celui de Cavaillé Cole, près de Bédarieux. Il faut des routes, le contournement Ouest et la déviation Est de Montpellier, le Lien… Il faut du foncier et de la mobilité”. En conclusion, le sénateur Henri Cabanel pose une condition incontournable au développement économique du département : “Il va falloir que des territoires partagent leurs richesses et que tout ne se fasse pas dans la métropole”.