Economie — Département Hérault

Hérault : la mort se met au vert avec Cimetière en Fleurs

La Montpelliéraine Margot Bergerol a une idée en tête : transformer les cimetières minéraux et granitiques en havres de verdure au cœur des villes. Ces lieux dédiés aux morts peu fréquentés par les vivants pourraient ainsi être envisagés comme “les poumons verts de demain, des lieux de refuge pour la biodiversité et des îlots de fraicheurs” avec, notamment, des tombes végétalisées. Un pari pas si incongru dans un secteur funéraire en mutation.

L’idée a germé sur un deuil pour fleurir sur une tombe. En 2022, Margot Bergerol a perdu son père. Elle a dû, avec son frère, organiser les obsèques. “Les tombes en marbre, en granit, ce n’est pas du tout ce que j’aime, ce n’est pas du tout moi, et ce n’était pas du tout notre père non plus. J’ai donc décidé de faire un peu ce que je voulais, vu que c’était une tombe en pleine terre.”

Exit, donc, la froideur granitique de la pierre tombale et de la stèle ordinaire  ; elle choisira la chaleur des plantes vertes pour fleurir sa sépulture. “J’ai commencé à planter des végétaux, des fleurs, des vivaces, des annuelles, des petits arbustes, explique-t-elle. Et je me suis rendu compte que cela m’aidait énormément dans mon processus de deuil, de créer un lien avec lui, de prendre part, entre guillemets, à son dernier lieu de vie. Cela m’a aidé de mettre les mains dans la création de quelque chose qui était pour lui”, confie-t-elle.

Une aide dans le processus de deuil

“Et puis, en y retournant, c’était agréable de voir une tombe un peu vivante. C’était très triste, évidemment, mais j’avais un peu hâte d’y aller, parce que je me demandais : “Comment vont être les végétaux ? Vont-ils être en fleurs ? Est-ce qu’il y en a qui vont avoir des feuilles vertes ? C’était hyper agréable pour moi aussi d’y aller, parce que c’était beaucoup plus reposant… Et cela m’aide continuellement dans mon processus de deuil.”

C’est ainsi que l’idée de Cimetière en Fleurs a germé.Je me suis dit que cela pouvait peut-être aider d’autres familles de créer des tombes végétalisées, selon ce même principe.” Margot Bergerol, alors âgée de 30 ans, plaque son boulot d’ingénieur agronome dans le secteur alimentaire (rayon communication) pour se lancer corps et âme dans son projet. “J’ai commencé à étudier le projet de manière concrète, en me disant qu’il y avait peut-être quelque chose à faire dans les cimetières en général, pas seulement sur les sépultures individuelles.” 

Tombes fleuries et “cimetières-jardins”

La jeune entrepreneuse de 32 ans aujourd’hui lance ainsi sa boîte sur le marché ce vendredi 1er novembre 2024 – jour ô combien approprié pour fleurir la tombe des défunts – selon deux axes commerciaux afin “d’enclencher les premières transformations des cimetières de notre région, pour en faire des cimetières-jardins, plus adaptés au recueillement, à la promenade et refuge pour la biodiversité”, explique-t-elle. 

Le premier s’adresse donc aux particuliers avec la création et l’entretien de sépultures végétalisées et personnalisées, pour les familles endeuillées. En premier lieu, je rencontre la famille pour recueillir leurs souvenirs, leurs envies, et le lieu d’inhumation ou crémation. Je réalise ensuite des études réglementaires et pédoclimatique pour travailler ensuite sur une piste créative adaptée au lieu d’inhumation ou crémation. Je présente une illustration de la tombe végétalisée, en les guidant sur les choix des végétaux, du couvre sol, de la stèle et du pourtour. Puis j’organise l’intervention en réalisant un process travaux auprès de la mairie. Enfin, le jour de la réalisation, je propose à la famille de participer pour planter les derniers végétaux, afin qu’ils puissent avoir une dernière action personnelle et mémorielle. Pour finir, ils ont l’assurance que j’entretiendrai cette tombe pendant 5 ans, selon un contrat potentiellement renouvelable.”

Les communes face à la mutation funéraire

Les prix dépendent eux aussi de la volonté des familles endeuillées mais ils oscillent entre 2 000 € pour une cave urne, 3000 € pour un toit végétalisé sur une pierre tombale classique, et entre 2 500 € et 4 900 € maximum, “pour être à peu près sur une moyenne de ce que peuvent proposer les pompes funèbres, par exemple”, pour une tombe fleurie. 

Autre cible dans le viseur de Cimetière en Fleurs : les collectivités avec un volet “conseil en aménagement paysager et funéraire”. Les enjeux funéraires sont nombreux pour les communes en charge de la gestion des cimetières : restructuration, végétalisation, entretien des allées gravillonnées suite à l’arrêt des produits phytosanitaires, perméabilisation des allées du cimetière, saturation de l’espace crémation …. “Je leur propose donc un accompagnement personnalisé, lance Margot Bergerol. Après un état des lieux complet de la situation actuelle des cimetières de la commune  – funéraire, paysager, administratif, historique, visite, communication, etc. -, je réalise un diagnostic pour identifier les atouts et axes d’amélioration pour chaque cimetière. Enfin, je leur présente la stratégie de restructuration qui inclut le calendrier d’intervention, les modalités techniques, l’estimatif budgétaire, et le plan de communication.” 

Une vision à rebours des traditions

Une vision du cimetière comme lieu de vie qui va à rebord des préconçus français sur le sujet. “Nos cimetières urbains et ruraux sont fortement minéralisés : au niveau des concessions des particuliers (les pompes funèbres ne proposent que des monuments en granit ou marbre), comme au niveau des espaces communs”, estime la jeune entrepreneuse. Elle souhaite transformer ces endroits “froids, sans vie voire abandonnés, en grande partie à cause de cette minéralisation importante” en des espaces similaires aux cimetières anglo-saxons, “des lieux fleuris, presque comme des jardins, dans lesquels les familles pourraient se balader et se recueillir dans un lieu plus apaisant et vivant après une inhumation ou une crémation”. Et elles pourraient, sur la tombe de leurs défunts, planter un bouquet de myosotis – ces petites fleurs bleues ou blanches à oeil jaune – que l’on appelle aussi “Ne m’oubliez pas”. 

Contact par mail : margot.bergerol@cimetiereenfleurs.fr ; par tél. au 06 15 58 05 81 ou sur sa page Instagram @cimetiereenfleurs.

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