Le notaire a désormais un rôle essentiel en matière de PMA
Par son texte, la loi bioéthique crée un cadre juridique en prévoyant des mesures strictes, comprenant la sécurisation de la filiation des enfants. Cette sécurisation est assurée par le notaire, qui va rendre la filiation de l’enfant incontestable.
Le contexte
La procréation médicalement assistée ou PMA existe en France depuis la loi du 6 août 2004 pour les couples hétérosexuels. Les dispositions de cette loi ont été révisées par la loi du 7 juillet 2011 afin de délimiter l’usage des techniques de PMA aux couples infertiles ou ne pouvant, sans danger, avoir un enfant.
Le 2 août 2021, la loi relative à la bioéthique a élargi la procréation médicalement assistée aux couples de femmes et aux femmes seules. Cette législation donne des droits nouveaux pour les enfants nés de la procréation médicalement assistée. Elle contient d’autres dispositions, notamment l’autoconservation des gamètes hors motif médical, la recherche sur les embryons et les cellules souches.
La procédure législative
Avant que la loi bioéthique n’entre en vigueur, une longue procédure législative a été requise. Le 24 juillet 2019, le projet de texte d’origine gouvernemental est devenu un projet de loi suite à son vote en Conseil des ministres. Postérieurement à ce passage, il a été intégré dans le panorama des lois. Dans la même journée, le texte a été examiné par le Parlement (constitué de l’Assemblée nationale et du Sénat) puis approuvé par les deux assemblées le 29 juin 2021. Dans certaines circonstances, il est possible de demander un nouvel examen et le Conseil Constitutionnel peut être saisi pour vérifier que le texte de loi n’est pas contraire à la Constitution, norme supra législative. C’est ce qu’il s’est passé pour la loi bioéthique : sa promulgation a été retardée au 29 juillet 2021. Enfin, le 2 août 2021, le texte de loi a été promulgué par le président de la République. Ce processus s’est conclu par la publication de la loi au sein du Journal officiel.
L’intervention du notaire
Le Conseil supérieur du notariat juge important de souligner le rôle des notaires en matière de filiation suite à la loi bioéthique : « Ce projet de loi marque une étape juridique importante pour le droit de la famille. L’Etat a décidé de confirmer le rôle du notaire dans le processus de sécurisation de la filiation de tous les enfants nés après recours à une PMA. Cette confiance renouvelée souligne, s’il était encore besoin, que l’acte authentique est un instrument juridique parfaitement adapté aux évolutions de notre société », commente David Ambrosiano, président du Conseil supérieur du notariat.
C’était déjà le cas pour les couples hétérosexuels recourant à la PMA, mais désormais il en va de même pour les couples de femmes et pour les femmes seules, qui pourront donc exprimer leur consentement devant un notaire. Ce dernier aura la capacité de rédiger un acte authentique, ce qui permettra la sécurisation de la filiation des enfants. Lors de la réception de cet acte, sera également recueillie la reconnaissance conjointe de l’enfant à naître par le couple de femmes ou d’une femme seule. L’acte authentique reçu par le notaire permettra ainsi d’établir la filiation indubitable et incontestable de l’enfant. Ainsi, il sera inscrit dans l’acte de naissance intégral que : « Les deux mères auront reconnu l’enfant à telle date devant notaire ».
Les conséquences de la reconnaissance de l’enfant
Le notaire a pour mission de s’assurer de la liberté du consentement qu’il recueille. Il doit également informer les futurs parents des conséquences extra-patrimoniales et patrimoniales que ce consentement à la PMA et cette reconnaissance de l’enfant à naître impliquent. Au niveau patrimonial, la déclaration anticipée devant notaire engendrera un lien de filiation avec les parents des deux femmes. L’enfant deviendra de plein droit le petit-fils ou la petite-fille des grands-parents. Avant la nouvelle loi bioéthique du 2 août 2021, les couples de femmes qui recouraient à la PMA dans un pays étranger pouvaient se retrouver dans une situation où certains membres de leur famille n’acceptaient pas l’enfant à naitre et demandaient à le déshériter. Maintenant, cela n’est plus possible.
Pour établir ce service social qu’est la reconnaissance de filiation conjointe anticipée, les couples de femmes ou une femme seule devront payer la somme de 250 € et 88 € pour le passage chez le notaire. En revanche, le notaire a un droit discrétionnaire de refus de la déclaration de filiation conjointe anticipée s’il émet le moindre doute sur la sincérité des futurs parents. Le notaire a donc la charge de faire signer cette reconnaissance mais aussi le devoir d’alerter.
La reconnaissance de filiation par le notaire pour une PMA d’un couple de femmes ou d’une femme seule est donc un pas de plus vers la démocratisation des actes relatifs au droit de la famille mais également un pas de plus vers la communauté LGBT. Certains notaires estiment que cette démocratisation pourrait bel et bien s’étendre au domaine de l’adoption. Dans le futur, il est possible d’imaginer que l’adoption pourrait se faire chez le notaire.