L'Éco de l'Hérault : Trèfle, future entreprise adaptée, proposera des "projets socio-professionnels" aux personnes handicapées
Ghyslain Morvan est à la tête de l'entreprise Traiteur Grand depuis presque 20 ans. Il lance aujourd'hui Trèfle, entreprise adaptée en cours d'agrément, qui aura pour vocation de trouver un emploi aux personnes éloignées du monde du travail à cause de leurs handicaps.
A tout juste 23 ans, alors qu’il était étudiant en ingénierie d’affaires, Ghyslain Morvan a racheté ses deux premières sociétés. “Ce que je voulais, c’était être chef d’entreprise, assume-t-il. Il se trouve que ce sont des traiteurs que j’ai racheté car c’est ce que je faisais comme job à ce moment là. Monsieur Grand voulait arrêter, je lui ai donc racheté sa boîte.” C’était le début d’une success story : Traiteur Grand s’est considérablement développé pour devenir l’un des plus gros traiteurs haut de gamme du sud de la France.
Pour en arriver là, l’entrepreneur a dû relever un premier challenge de taille : les difficultés de recrutement dans une branche où les salariés dénoncent une polyvalence extrême et une forte pénibilité. Ghyslain Morvan a donc mis en place un modèle différent de ce qui se faisait dans cette profession : “j’ai découpé la chaîne de valeur et repensé notre activité autour de 3 métiers”. Il crée donc trois sociétés : M Gastronomie fabrique des plats cuisinés et les vend, M Service fait de la location et du transport de matériel et de denrées alimentaires et M Réception embauche des maîtres d’hôtel, des chefs de prestation et des cuisiniers.
La holding propriétaire de ces structures, Valoré, créée en 2009, a fait 12 millions de chiffre d’affaires l’année dernière. En tout, Ghyslain Morvan est désormais à la tête de pas moins de 16 entreprises, majoritairement dans le domaine de la restauration mais aussi dans la formation et l’immobilier. Dernier challenge en date : obtenir l’agrément afin de créer Trèfle, une entreprise adaptée, c’est-à-dire une structure accueillant majoritairement des personnes reconnues handicapées.
La rencontre : Ghyslain Morvan, fondateur de Trèfle
Hérault Tribune : Qu’est-ce qui vous motive dans la création d’une entreprise adaptée ?
Ghyslain Morvan : Je suis impliqué dans le campus handicap du Medef et depuis 2020 dans le campus de l’inclusion, c’est un sujet qui me tient à coeur. Une fois que j’ai construit avec mon entreprise un modèle qui marche, qui sectorise les tâches, et maintenant qu’on gagne de l’argent avec cette méthode, je peux me concentrer sur le modèle social et le développer. Nous avons désormais la possibilité d’accueillir des personnes plus fragiles. Il faut savoir que les handicapés sont deux fois plus touchés par le chômage que les autres.
L’entreprise n’existe pas encore mais vous recevez déjà des candidatures…
Oui, j’ai fait la demande d’agrément Entreprise adaptée pour ma société Le Marché français, je devrais l’obtenir en septembre. En attendant, j’ai déjà 7 salariés handicapés et je reçois plus de candidatures que je n’ai de postes à pourvoir. Mon but est donc de trouver des entreprises pour y déporter des travailleurs. L’avantage est double : pour le salarié il a un projet socio-professionnel et retourne vers le monde du travail et pour l’entreprise c’est un premier pas vers l’embauche de personnel handicapé et je leur remet en plus un reçu libératoire si elles n’arrivent pas à atteindre leur quotat.
En termes de management, qu’est-ce que ça change de travailler avec des personnes handicapées ?
D’abord, il y a une forte méconnaissance du handicap puisque les gens pensent tout de suite fauteuil roulant. Les PMR ne représentent que 20% des handicapés et il y a aussi beaucoup de handicap invisibles. Ce que ça change pour le management, c’est qu’il faut prendre en compte des spécificités : je cherche donc le poste le plus adapté en fonction des besoins de la personne. L’Esat La Bulle bleue et Cap Emploi, avec qui je travaille, font une première sélection avant de m’envoyer des candidatures. Et puis je continue à me former à la sensibilisation et à la collaboration avec du personnel porteur de handicap ou plus fragile. La manière dont on explique un process, par exemple, est différente si on s’adresse à quelqu’un qui est dyslexique, on préférera les images au texte. Autre exemple, avec un autiste, il ne faut pas multiplier les tâches mais plutôt leur faire faire une tâche simple à répétition.
Quels sons vos projets pour l’avenir ?
Pour l’instant, je me consacre à Montpellier car j’aimerai en faire une référence en matière d’inclusion, je pense que la ville a une carte à jouer sur ce sujet. Ensuite, je voudrais développer le projet ailleurs en Occitanie puis à Paris, probablement en septembre, avant de viser le reste de la France.