Législatives, 4e circonscription : l'avis des candidats sur la ligne nouvelle Montpellier - Perpignan (LGV)
L'association Alerte LGV sur Thau a demandé aux candidats à la députation sur la 4e circonscription leur point de vue sur cette LGV.
L’association Alt Lgv mobilise le territoire pour faire modifier le tracé de la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan. Parmi ses actions, elle a demandé aux candidats de ces législatives 2022 leur avis sur le projet : “le but de l’association, c’est de faire connaître aux futurs élus les enjeux de la LNMP pour le bassin de Thau. Les prochaines semaines seront cruciales pour nous faire entendre auprès de la première ministre et des membres de son gouvernement. Les députés élus sur les circonscriptions 4, 7 et 8 auront un rôle clé à jouer pour que nous nous fassions entendre. Leur implication future sur le sujet est directement proportionnel aux chances que le projet soit reconsidéré” explique Félix Caron le président de Alt. Voici la réponse de certains.
Julie Péréa, La Raison du peuple
“La réunion publique sur le projet de LNMP organisée par l’Observatoire de Thau à laquelle j’ai assistée, le 30 novembre 2021 à Poussan, m’a permis de me positionner sur certains aspects du projet, mais pas tous, par manque d’informations. Ces positions étant trop nombreuses pour toutes vous les exposer, je vais vous en exposer quelques-unes. Mais avant, je souhaite vous préciser qu’en tant que conseillère municipale de la commune de Poussan, je me suis abstenue lors du Conseil municipal de février 2022 à la délibération correspondante. Je suis contre le projet en l’état actuel de ma connaissance, mais je n’étais pas en accord avec certaines formulations de la délibération.
Je partage l’utilité d’obtenir des réponses de la part des pouvoirs publics concernant certaines questions environnementales soulevées tant par l’étude d’impact que par certaines associations comme la vôtre.
Toutefois certaines de ces questions ne confondraient-elles pas danger et risque ? Par exemple, si le danger de déraillement d’un train de marchandises dangereuses du futur viaduc, passant éventuellement sur la commune de Poussan, représente un danger pour la lagune de Thau, le risque que cela arrive est très faible au vu de l’histoire ferroviaire. Le principe de précaution sous-jacent devient un alibi pour ne rien faire, pour ne pas prendre de responsabilité, pour ne pas prendre des risques dans un projet dont la perspective dépasse nos frontières comme vous le soulignez dans votre document « Revendications et propositions ». Car où que le tracé passe, il aura un impact. En termes de danger, et au vu de quelques discussions avec des professionnels de la lagune de Thau, cette dernière me semble déjà menacée sur les 10-15 ans en la rendant plus attractive pour les touristes. Les coquillages meurent, faute de nourriture suffisante.
Ceci étant, quel que soit le futur tracé, les techniques actuelles et les matériaux utilisés doivent garantir un impact minimum sur les milieux naturels et les nappes phréatiques. J’admets que le tracé actuel aura de très nombreux impacts notamment sur les vignes de Picpoul. Et s’il en existe un plus approprié, je veux bien l’étudier et le soutenir.
La voie ferroviaire est la plus économe pour les très longues distances (intercontinentales) par rapport au maritime et particulièrement en cette période où une forte inflation secoue les marchés financiers des ressources énergétiques et contribue à faire exploser les prix du transport maritime en container. Je partage donc votre intérêt de réduire le nombre de camions sur les routes et autoroutes et de développer le fret dans notre région en lien avec le reste de l’Europe, et même au-delà grâce à l’initiative « une Ceinture, une Route ». Mais je ne suis pas favorable à la mixité de la future ligne. Le fret doit avoir une ligne qui lui est dédiée : déjà, parce que les matières dangereuses passent dans les gares voyageurs et ensuite parce que les trains de marchandises sont obligés de ralentir à chacune d’entre elle bien qu’ils n’aient pas besoin de rouler aussi vite qu’un TGV. Cette ligne de fret devant être relié au port.
Le projet actuel de la LNMP pose le même problème que les voyages en avion à l’époque de l’apparition du TGV. Ce dernier concurrençait les lignes aériennes en proposant aux voyageurs d’arriver plus vite, pour un même trajet de ville à ville, directement en centre-ville. Or là, on repousse les gares TGV loin des centres-villes. Ceci n’a aucun sens. A supposer que le report modal soit pensé au mieux en termes d’intermodalité (maritime/ferroviaire/fluvial) avec le projet de LNMP, une discussion avec les représentants de SNCF Réseau à la fin de la réunion publique, précédemment citée, montre qu’on est loin d’une ramification efficace (voiture/bus/TRAM/TER/TGV, etc.) pour les déplacements des usagers au quotidien. A plus forte raison si les usagers vivent loin des futures gares TGV de la LNMP. Lorsque j’ai relevé dans la discussion que la nouvelle gare TGV de Montpellier n’était pas encore desservie par des bus ou des TRAM, les représentants de SNCF Réseau m’ont expliqué qu’ils n’étaient responsables que de la partie ferroviaire (fret/voyageurs) et que les autres modes de transports ne les concernaient pas.
Pour moi, c’est la conséquence du renoncement des élus et décideurs politiques à l’État stratège, et avec lui, à la notion de bien commun à travers la planification des projets d’infrastructures à l’échelle nationale, qui auraient dû se penser à l’échelle européenne à minima. Tout en tenant compte de leur ramification de la région jusque dans les localités avec la complémentarité des autres modes de transports, y compris de nouveaux modes de transports non encore utilisés en
France (maglev, spacetrain par exemple).
Pour être cohérent avec l’intérêt d’un TGV, comme à son origine, il faudrait conserver les TGV en centres-villes, quitte à construire ses arrêts en sous-sol comme à Anvers. Par idéologie, les élus et décideurs politiques ont également renoncé à se doter des moyens financiers de projets aussi ambitieux. Ils ont fait le choix dans les années 1980 de se passer d’une véritable banque nationale, permettant d’emprunter à un taux proche de zéro, en préférant emprunter aux marchés financiers avec des taux d’intérêts qui représente au moins 40 milliards d’euros par an.
Vu le nombre de personnes qui s’intéressent au devenir du projet de la LNMP, c’est l’occasion de nous questionner sur l’importance de reprendre le contrôle de l’argent pour le diriger vers des projets ambitieux capables de répondre au développement économique tout en préservant notre environnement.”
Michel Garcia, sans étiquette
“Ce projet imaginé, il y a plus de 30 ans, est aujourd’hui en parfaite inadéquation avec les exigences actuelles que sont le changement climatique, le préservation de l’environnement, la qualité de vie et le développement économique des territoires. A ce stade, et au vu des conséquences néfastes sur:
- La biodiversité : destruction de plusieurs zones humides, traversée de 6 zones Natura 2000, du Massif de la Gardiole (site classé) …
- L’eau: mise en danger de la zone de captage d’Issanka (seule source d’eau potable pour le Bassin de Thau)
- L’agriculture : destruction de 10% du vignoble de Picpoul en AOC
- L’attractivité du territoire : moins de trains à Sète, difficultés pour les touristes comme les locaux.
- Le patrimoine : destruction d’une partie de Via Domitia.
- Mais aussi l’économie, la mobilité, la qualité de vie ..
La liste des conséquences négatives est longue, comme l’a bien détaillée Alerte Thau LGV avec ses 18 aberrations pour gagner 18mn. Je rejoins toutes les préconisations de l’association ALT notamment celle de l’urgence d’une étude complémentaire car si personne ne remet en cause l’utilité d’une LGV sur notre territoire, ce tracé n’est absolument plus compatible avec les enjeux d’aujourd’hui et encore moins de demain.
D’autant que des solutions existent avec un autre tracé pour peu qu’on prenne le temps d’étudier cette possibilité. L’utilité de ce projet doit se mesurer en bénéfices pour plusieurs générations de notre territoire. Il faut impérativement que soit respectée la séquence ERC : Eviter/Compenser/Réduire. « Dans la conception et la mise en œuvre de leurs plans, programmes ou projets, il est de la responsabilité des maîtres d’ouvrage de définir les mesures adaptées pour éviter, réduire et, lorsque c’est nécessaire et possible, compenser leurs impacts négatifs significatifs sur l’environnement » (Ministère de la transition écologique – 14 février 2022).
- ÉVITER les atteintes à l’environnement
- RÉDUIRE ces atteintes, dans le cas où elles n’ont pu être suffisamment évitées ;
- COMPENSER ces atteintes dans le cas où elles n’ont pu être suffisamment évitées et réduites et s’il reste un impact résiduel notable.
Il est urgent de prendre le temps. La vitesse n’est plus une priorité, le respect de l’environnement et des citoyens de notre territoire, oui !”
Sébastien Rome, La France Insoumise – Nupes
“Comme candidat pour la Nouvelle Populaire écologique et sociale sur la quatrième circonscription de l’Hérault, je réaffirme faire bloc avec les demandes du collectif ALT pour un autre tracé LGV. Ce tracé doit être respectueux de notre patrimoine, de notre biodiversité, de notre économie… Je renouvelle ainsi mon opposition comme le 27 mars dernier lors de la manifestation à laquelle j’ai participé.
La loi Biodiversité de 2016 vise à ce que les aménagements n’engendrent pas d’impact négatif sur leur environnement et en particulier qu’ils n’occasionnent aucune perte nette de biodiversité dans l’espace et dans le temps. Or, le tracé traverse le périmètre et le captage d’eau d’Issanka, pour lequel des études sont encore en cours pour s’assurer de la compatibilité du projet. Cette nappe alimente en eau potable des dizaines de milliers d’habitants du Bassin de Thau. Pareillement, le bilan carbone de l’opération ne pourra pas être équilibré avant 240 ans. Fruit d’une alliance locale et nationale entre le PS, la LREM et LR, les deux nouvelles LGV d’Occitanie au coût global de 20 milliards sont à classer dans les grands projets de la France des années 80. Il est d’ailleurs cocasse que devant son inaction lourde de silences durant 5 ans, avec un tracé validé en 2016 et confirmé en 2017 et 2021, le sortant LREM ait choisi une membre de l’association ALT pour lancer un écran de fumée. Chez Macron, les apparences d’avant élection prennent le pas, depuis 2017, sur l’action.
La moitié seulement de ces 20 milliards d’euros permettrait de réactiver les 8700 km de lignes ferroviaires fermées depuis 40 ans. Si nous projetons en juin le blocage des prix de l’essence à 1,40€, à long terme la Nouvelle Union créera un vrai réseau de transport acier sur acier pour les déplacements du quotidien et sortir du tout voiture. Pour réussir la bifurcation écologique, il faut radicalement changer de modèle et s’assurer que la justice sociale soit au cœur de l’action écologique. Les classes populaires et moyennes doivent être les gagnantes de cette transition.
20 000 personnes font chaque matin le trajet entre le lodévois, le clermontais et le gignacois vers Montpellier. Peut-on encore faire croître les bouchons dans les années à venir avec l’augmentation exponentielle de la population en cœur d’Hérault ? Même le bus n’est pas une solution. 400 bus vers Montpellier tous les matins, est ce soutenable ? Aller prendre un TGV à la gare fantôme de Montpellier, la Mogère, du fait de la disparition programmée de l’arrêt TGV pour la gare de Sète, est-ce raisonnable et écologiquement responsable pour les habitants du bassin de Thau ?
Le modèle “tout voiture” encourage l’étalement urbain, la disparition des terres agricoles et l’appauvrissement des centres de nos villages au profit des métropoles. Faire le choix de reconstruire des lignes ferroviaires et d’ouvrir celles qui ont été fermées, c’est aussi relancer l’emploi en France sur des technologies de pointe que nous maîtrisons.
Le PDG de la SNCF a lui-même déclaré que « l’enjeu ce n’est plus la vitesse aujourd’hui (…), c’est l’écologie ». Est-il sérieux de dépenser 1,3 milliard d’euros pour gagner 10 minutes sur la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan ? Une ligne Lodève-Montpellier coûterait environ 250 millions d’euros et serait une réponse à l’augmentation du trafic routier quand aucune augmentation de la fréquentation est prévue sur la ligne TGV ! Avec un tracé à 220 km/h, la vitesse est largement suffisante pour réduire de moitié le temps de trajet sans arrêt entre Perpignan et Montpellier. Cela permettrait surtout de préserver les vignobles du Picpoul dont 10% de sa superficie disparaîtrait avec ce projet ; les paysages du massif de la Gardiole, en suivant le couloir de l’A9 ; les nuisances sonores et visuelles des habitants. Nous éviterons la construction d’un viaduc de 1,4 km de long dont l’impact paysager et écologique est attesté ; enfin, la gare de Sète ne serait pas menacée.
Elisabeth Borne est responsable de la casse de la SNCF durant le dernier quinquennat où la question centrale des déplacements est restée au stade des paroles creuses. Je crains qu’en se tournant vers les mêmes qui ont validé par deux fois ce projet, la réponse soit la même. Mais un autre choix est encore possible au mois de juin avec l’assurance d’un député qui épouse vos idées sur le tracé de la LGV.
Nous l’affirmons, avec La Nouvelle Union Populaire écologique et Sociale, nous stopperons les logiques de concentration de l’argent dans les métropoles dont ce tracé est l’illustration parfaite. Nous rééquilibrons avec les besoins de nos territoires qui sont tout sauf périphériques. Et maintenant, c’est à notre tour, à nous d’abord d’avoir les investissements pour le train du quotidien !”
Jean-François Eliaou, Ensemble
“En premier lieu je peux répondre sans ambiguïté aux questions que vous me posez : oui je suis opposé au tracé actuel de la future LNMP et oui je continuerai à agir, avec vous, l’Observatoire du Pays de Thau, les élus et vos adhérents, afin d’obtenir la modification de ce projet de tracé. Comme j’ai eu l’occasion de le dire je suis également favorable, sur le principe, à un projet de LGV entre Perpignan et Montpellier.
Concernant mon mode d’action, il dépendra naturellement de ma réélection en tant que député de la 4ème circonscription de l’Hérault. Député de la majorité présidentielle je poursuivrai le dialogue avec les services du premier ministre, comme lors d’une réunion avec Jean Castex le 10 décembre dernier, les ministères de l’Intérieur et de la Cohésion des territoires et les service préfectoraux, le tout en concertation avec les acteurs locaux.
J’ajoute que j’ai déjà eu plusieurs fois l’occasion d’échanger avec Elisabeth Borne en début de mandat, lorsqu’elle était ministre des transports (notamment lors d’une réunion au ministère le 8 novembre 2017 avec les députés majoritaires d’Occitanie, dont j’ai été à l’initiative et à consulter ici, puis en tant que membre d’un groupe de travail sur les mobilités en préparation de la loi mobilités promulguée en 2019).
A l’occasion des réunions publiques du 29 novembre 2021 à Poussan, du 13 décembre 2021 à Gigean et du 21 janvier 2022 à Sète, j’ai pu écouter les attentes des citoyens et des acteurs concernés, agir ensuite auprès du Gouvernement et de la préfecture et développer ma position décrite ci-dessus : accord sur le principe de la réalisation d’une LGV mais opposition claire et ferme au tracé proposé actuellement.”