Montpellier : Ōme, de la fève au bar
Ome, c’est un bean to bar. Boissons, pâtisseries, tablettes… Tout tourne autour du chocolat dans cet établissement qui le fabrique directement à partir de la fève.
“Un bon chocolat n’a besoin que de deux ingrédients : du sucre, du cacao et c’est tout. C’est notre philosophie”, raconte le cofondateur d’Ōme, Florent Behaegel. C’est d’ailleurs, le sens du nom de l’établissement. Ome, signifiant “deux” dans un dialecte aztèque, soit le nombre d’ingrédients de la recette. L’établissement qui vient tout juste d’ouvrir ses portes 56 rue Saint-Guilhem, à Montpellier, est à la fois bar, manufacture et boutique. C’est un bean to bar, à comprendre littéralement : “de la fève au bar”. Dans cette boutique, on fabrique la matière première : le chocolat, à partir de la fève. Et tout cela afin de créer diverses variations gourmandes : tablette, pâtisserie, boisson… Et surtout, de manière éthique. Transport en voilier, rémunération juste des producteurs, agriculture en agroforesterie, la fève de cacao est chouchoutée.
À l’origine, le chocolat est une passion commune aux deux fondateurs, Florent Behaegel et Sophie Paluel-Marmont, qui ont commencé l’aventure Ōme comme une reconversion professionnelle. “En arrivant à Montpellier dans le cadre d’une évolution professionnelle, on a cherché partout un bean to bar. On a fait 50, 100, 200 km sans rien trouver, explique Florent. Il y en a un à côté de Nîmes, l’autre près de Pézenas mais qui vend exclusivement aux épiceries fines. Nous ce qu’on voulait, c’était un lieu de dégustation où on peut voir les machines tourner.” Et pour cause, il n’y avait pas de modèle de ce genre à Montpellier.
Pour illustrer le comportement du marché, il illustre : ”Si on compare avec le café, le chocolat a environ 10 à 15 ans de retard. Aujourd’hui, il y a des coffee shops qui se développent, mais beaucoup moins sur ce modèle de “chocolate shop”. Un marché donc en pleine croissance. Si ce premier bar venait à être fructueux, les deux associés continueraient dans leur lancée en ouvrant à “Toulouse, parce qu’il y a une vraie demande, Bordeaux et Paris”.
La rencontre : Florent Behaegel, cofondateur d’Ōme
Hérault Tribune : Vous partez de la fève de cacao pour fabriquer votre chocolat. C’est un coût supplémentaire de produire son chocolat soi-même ?
Florent Behaegel : La réponse est claire, oui, c’est plus cher. D’abord, on travaille des cacaos d’exception qui coûtent entre 9 à près de 20 dollars le kilos, alors que le marché du cacao se situe aux alentours des 4 à 7 dollars. Ensuite, cela nécessite de la main d’œuvre. Nous travaillons le cacao comme on travaille un vin. On parle de maturation, de torréfaction. C’est de l’artisanat… Qu’on adapte en fonction de chaque cacao. Dans l’industrie actuelle, vous allez acheter un chocolat qui est transformé. Des gros volumes qui viennent d’une trentaine de producteurs. On va tous broyer ensemble, on va torréfier très fort, au point d’avoir quelque chose d’amère parfois et ça va permettre de créer ce goût unique. Nous, nous essayons sur chaque plantation de tirer le meilleur du cacao et de ses saveurs, mais cela à un coût.
Comment fait-on un chocolat éthique ?
On respecte la matière. On part de la philosophie que c’est à nous de s’adapter à la matière et pas à la matière de s’adapter à nous. C’est pour ça qu’on ne met pas de lécithine, ce produit chimique qui sert à donner de la brillance et du craquant au chocolat. On travaille avec des producteurs qu’on connaît, auxquels on impose de suivre des méthodes de fonctionnement et d’agricultures bien spécifiques. Le producteur a plusieurs mois de travail en plus par rapport à une industrie plus importante, qui ne contrôlera pas certaines étapes comme la fermentation. Les cacaos qu’on choisit sont également en agroforesterie, donc pas dans une production intensive. Enfin, on ramène une partie de notre cacao à la voile.
Vous vous installez dans une rue très concurrentielle en matière de chocolat, pourquoi faire ce choix ?
Beaucoup de clients m’ont dit à ce sujet : “oui mais comme ça on sait dans quelle rue aller pour avoir du chocolat”. Et puis, pour moi, ce sont des métiers complémentaires. Il y a des épiceries fines et des chocolatiers de métiers qui magnifient le chocolat dans cette rue, mais pas de transformateurs de fèves de cacao. Notre métier est de faire de la recherche sur quel est le meilleur goût pour une fève. On cherche à magnifier le cacao et avoir des goûts très particuliers, travaillés, pour avoir un chocolat d’exception. On ne cherche pas à faire des associations avec certains produits, enrobages ou rochers. C’est comme si vous mélangez un vigneron d’une plantation avec un négociant en vins.