Politique — Montpellier Méditerranée Métropole

Montpellier : plus de 8 fonctionnaires sur 10 ne sont pas formés aux principes de la laïcité

La journée de la laïcité a été célébrée le jeudi 9 décembre. Au Corum de Montpellier, l’une des trois tables rondes concernait le nouveau plan de formation obligatoire à la laïcité visant 100% des agents de la fonction publique, d’ici 4 ans.

© Mathieu Weisbuch

C’est d’abord un constat alarmant pour Isabelle de Mecquenem, professeure agrégée de philosophie et membre du conseil des sages de la laïcité qui intervenait pour la conférence sur les services publics et présentait un document intitulé 17 décisions pour la laïcité. En effet, selon un sondage effectué en novembre 2020, il n’y aurait que 15% des agents de la fonction publique à avoir reçu une formation aux principes de la laïcité. Un chiffre qui ne doit pas masquer l’intérêt des agents pour le sujet : 40% des agents interrogés le considèrent comme prioritaire, et 51% important mais pas prioritaire.

Les auteurs des atteintes à la laïcité

Mais c’est à partir de cette lacune qui concernerait plus de 8 agents sur 10, qu’un plan de formation sur la laïcité a été rédigé pour la totalité des fonctionnaires. Une nécessité au regard des chiffres sur les atteintes à la laïcité dans le cadre professionnel des agents. Si 13% des fonctionnaires déclarent ces atteintes régulières et 18% les considèrent comme des événements isolés, on apprend par ce sondage de novembre 2020, qui sont les auteurs de ces litiges. “Les réponses désignent pour moitié les agents eux-mêmes”, révèle Isabelle de Mecquenem.

Citoyens et personnes

Le document intitulé 17 décisions pour la laïcité se veut opérationnel, prêt pour une mise en pratique auprès des acteurs de terrain. Il a été commandé par le nouveau comité interministériel de la laïcité. Le document ne s’attarde pas sur les controverses autour de la laïcité. Celle-ci est érigée en norme constitutionnelle qui dépasse les divergences. Car, “la constitution est la loi commune pour nous tous en tant que citoyens, et c’est la sphère publique et politique qui est réglée par la constitution”, rappelle la philosophe qui marque au passage la différence entre citoyens et personnes.

Une administration de la laïcité

laicite
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La formation à la laïcité a demandé une redistribution des rôles. Au sein du ministère de l’intérieur, qui abrite le bureau des cultes, il a été créé un secrétariat général de la laïcité. A ce nouvel outil du pouvoir exécutif s’ajoutent un bureau de la laïcité et le site internet laicite.gouv.fr qui recense une immense documentation sur le sujet. Toutes ces instances remplacent désormais l’observatoire de la laïcité. Ils constituent ce qu’Isabelle Mecquenem nomme “les jalons administratifs de la nouvelle politique publique” en faveur de la laïcité. Elle évoque même la crainte “d’être témoin de la création d’une administration de la laïcité avec ces avantages et ces inconvénients”. En atteste pour la philosophe, certains mots significatifs du document 17 décisions pour la laïcité. Elle relève les verbes “garantir” (un meilleur respect de la laïcité), “renforcer” (ce principe), “l’étendre”, le “contrôler”, voire “l’imposer”. Pour Isabelle de Mecquenem, ces mots prouvent que nous sommes en présence d’une “politique publique conduite par le pouvoir exécutif ”.

Le méconnu article 25

Pour son travail, la philosophe s’est appuyée sur une loi de 2016 qui porte sur la déontologie des fonctionnaires, loi méconnue des agents du service public, à sa grande surprise. Dans cette loi, subsiste l’article 25, déjà issu d’une loi de 1983 portée à l’époque par le ministre communiste Anicet Le Pors, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Cet article 25 vise à définir les “vertus” du fonctionnaire : impartialité, probité, intégrité, exemplarité et surtout dignité. Ces vertus constituent le socle de la déontologie des agents, dont les contrevenants pourraient être exposés à des sanctions. Cette déontologie s’appuie donc sur une conception du bien. “Ça n’est pas une conception du bien personnel mais qui concerne la communauté des citoyens donc l’interaction entre les agents de la fonction publique et les usagers”, explique Isabelle Mecquenem.

les référents de l’éducation nationale

La formation des agents de l’éducation nationale va bénéficier d’un effectif particulièrement fourni et rarement vu. Plus de 1000 référents de la laïcité vont être formés en 4 ans pour ensuite former à leur tour les autres agents. Une disposition préconisée par le rapport Obin qui constatait dans une enquête de terrain auprès des enseignants que seul un sur 100 avait été formé à la laïcité dans le primaire et 4 sur cent dans le secondaire.

Malaise avec les jeunes enseignants

Pour Isabelle de Mecquenem, “les enseignants sont des fonctionnaires, mais ont tendance à l’oublier”. Ce petit pic lancé à plusieurs reprises pendant la conférence n’a pas toujours été bien accueilli dans la salle clairsemée. Néanmoins, une enquête de la fondation Jean Jaurès réalisée de janvier à juillet 2021 fait apparaître cette distinction qu’évoque la philosophe. En effet, à la question posée aux enseignants sur leur conception de la laïcité, l’enquête révèle que “les enseignants de moins de 30 ans souscrivent de façon massive, comme un seul homme, à une conception de la laïcité de tolérance interreligieuse. Donc pour eux, la laïcité est un idéal de tolérance entre les différentes convictions religieuses. Or, il apparaît que ces jeunes enseignants partagent du coup la même conception que leurs élèves”. Ce constat fait dire à la philosophe, et ça sera son unique commentaire personnel, que “chez les jeunes enseignants de moins de 30 ans, prévaut l’appartenance à la catégorie sociologique de la jeunesse sur leur statut de fonctionnaire et sur les obligations et l’éthique qui caractérisent la fonction publique”.

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Commentaires

    1. Bonjour madame
      Merci pour cet avis très positif sur notre média en ligne.
      Nous vous souhaitons d’excellentes fêtes de fin d’année.
      Cordialement
      Hérault Tribune

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