Notariat / Me Gilles Gayraud : les enjeux de 2022, l’interdépartementalité en question
Me Gilles Gayraud, président de la chambre départementale des notaires de l'Hérault, évoque pour nos lecteurs les enjeux qui se présentent au notariat en cette année 2022, et notamment le sujet de l’interdépartementalité, qu’il appelle de ses vœux.
Photo : Me Gilles Gayraud © Virginie Moreau.
Comment l’année 2022 débute-t-elle pour les notaires ?
Me Gilles Gayraud : « De manière plutôt satisfaisante. 2021 a été une année hors norme sur le plan immobilier, avec, au niveau national, plus de 1,2 million de transactions, ce qui n’avait jamais été atteint, à comparer aux 900 000 transactions enregistrées les années dites exceptionnelles.
2022 commence de manière sereine, même si, les élections présidentielles arrivant, nous ressentons un certain attentisme. Le marché immobilier a tendance à se calmer. Savoir comment il évoluera est un peu prématuré. Il faut le temps qu’un nouveau gouvernement s’installe. Les Français attendent de savoir qui sera à la tête du pays, quelles modifications législatives interviendront. Les programmes de certains candidats évoquent en effet une réforme des droits de succession, de la fiscalité sur les donations, ce qui est un thème sensible pour les Français. Une réforme du droit fiscal des successions est souhaitable et sera bénéfique pour la transmission du patrimoine. Faciliter la transmission du patrimoine aurait des impacts bénéfiques sur notre économie. »
Evoquons maintenant le sujet de l’interdépartementalité…
Me Gilles Gayraud : « Notre cour d’appel regroupe les départements de l’Aveyron, l’Aude, l’Hérault et les Pyrénées-Orientales. Chaque compagnie dispose d’une chambre départementale composée d’un bureau, et chargée de représenter les notaires de son ressort et d’assurer dans le département l’exécution des décisions prises par le Conseil Supérieur du Notariat et le Conseil Régional. Le but de l’interdépartementalité serait de professionnaliser les postes de présidence et de vice-présidence, en créant des postes de vice-président par département. Car suivant l’importance des chambres, il est très difficile à l’époque actuelle de gérer seul une chambre départementale. Ce que l’on appelle aujourd’hui le Conseil régional deviendrait une chambre interdépartementale regroupant les 4 départements (soit 620 ou 630 notaires).
A titre personnel, je pense que l’interdépartementalité est indispensable, car dans notre société, tout se spécialise, se professionnalise de plus en plus. Pour les petites chambres, il devient de plus en plus difficile d’assumer ces fonctions. Ce sont des mandats bénévoles, et les bonnes volontés se font de plus en plus rares…
L’interdépartementalité nous permettrait aussi de rationaliser les budgets. Ainsi, le budget communication engloberait les budgets communication des 4 départements, ce qui lui donnerait plus de puissance et de portée. Nos moyens d’actions économiques mais aussi humains au niveau des instances seraient accrus et rationalisés. Bien évidemment, les permanents de chambre demeureraient ; de nouveaux seraient peut-être embauchés.
Nous sommes en pleines discussions sur l’interdépartementalité entre nos 4 départements. Dans le département de l’Hérault, nous avons commencé à ouvrir ces discussions, à travers nos 3 associations d’arrondissement. La première réunion sur l’interdépartementalité a eu lieu dans le Biterrois le 1er février, avec l’Association des notaires du Biterrois. Ce fut une belle réussite car bon nombre de notaires du bassin biterrois y ont participé, en présence du président de l’Association des notaires du Biterrois, Me Viciana, du chef de la commission sur l’interdépartementalité Me Rasigade, et de moi-même. »
Les débats étaient-ils animés ou l’interdépartementalité coule-t-elle de source ?
Me Gilles Gayraud : « Pour cette première réunion, les débats et questionnements n’ont pas tellement porté sur le principe de l’interdépartementalité. Car dans l’Hérault, compte tenu de notre nombre, nous fonctionnons déjà à travers des associations d’arrondissement. Donc pour un grand nombre de notaires héraultais, l’interdépartementalité coule de source.
Les questionnements ont plutôt porté sur les statuts futurs de cette interdépartementalité, la représentation de chaque département au sein de cette nouvelle instance, les pouvoirs accordés au président, aux vice-présidents. La question des locaux dans les différents départements s’est également posée. La question de la nécessité de déplacer notre siège et la question des permanents ont également été posées, car chaque chambre a des permanents dans chaque département. Il n’y aura pas de licenciement ; l’idée est de leur assurer un avenir à travers de nouveaux postes. »
Comment les réunions sur l’interdépartementalité sont-elles organisées ?
Me Gilles Gayraud : « Des réunions sont prévues dans chaque département. Elles sont gérées par chaque instance. Dans l’Hérault, les réunions sont organisées au travers des associations d’arrondissement. Certains le feront par bassin de vie. L’organisation est adaptée à chaque territoire. Ces réunions permettent d’informer et de répondre aux interrogations de confrères qui ne s’étaient jamais intéressés à cette question ou qui y sont opposés. En mai, lors de nos assemblées générales, se tiendra un premier vote sur l’acceptation du principe de l’interdépartementalité. Si le principe est adopté en mai, cela va entraîner, d’ici les dernières assemblées générales du mois de novembre, la mise au point de l’organisation juridique de l’interdépartementalité et de la nouvelle instance. »
En quoi consiste le Plan de consolidation du maillage territorial ?
Me Gilles Gayraud : « Cette nouvelle action 2022 débutera prochainement. La première réunion aura lieu en mars. Notre département est éligible à cette aide émanant du Conseil Supérieur du Notariat. Son objectif n’est pas d’aider uniquement les études rurales, mais toutes les études volontaires et candidates qui disposent d’un vrai projet d’entreprise. Le projet peut par exemple être de fusionner avec une étude voisine, de rationaliser les pôles comptabilité, rédaction d’actes ou formalités. Cela peut être aussi de créer une société multi-offices pour rationaliser les coûts ; le projet d’entreprise peut porter sur le développement de conquête de nouvelle clientèle… L’objectif de ce Plan de consolidation du maillage territorial est de revivifier le tissu économique notarial. »
Dans vos vœux à la profession, vous avez souhaité que les notaires participent à la direction de l’INFN. Pourriez-vous expliquer pourquoi ?
Me Gilles Gayraud : « Cette direction commune est pour moi un sujet primordial. Il ne faut pas oublier que l’Institut National des Formations Notariales est la suite de ce que l’on appelait l’école de notariat. Cette école, et maintenant cet Institut, est le notariat avec l’aide des universitaires. Selon moi, l’INFN ne peut dans l’avenir se développer et tendre vers les besoins des notaires qu’en collaborant avec des notaires au niveau de la direction. C’est un vœu personnel, mais j’espère que le Conseil Supérieur tend vers la même optique. Je pense que l’on ne pourra pas se dispenser d’avoir des discussions avec l’INFN sur une direction commune composée d’universitaires et de notaires. Nous devons collaborer, discuter et aller dans la même direction, prendre des thèmes en commun et les aborder ensemble. Car actuellement, on peut sentir des distorsions entre la pratique et l’enseignement, comme cela existe déjà avec l’Education nationale. Il faudrait pallier cela pour le bien de tous : de l’INFN et du notariat local. Les notaires doivent pouvoir collaborer étroitement à l’élaboration du programme d’enseignement. Ma demande est très pragmatique. »