Pascal Castanet : "une nouvelle ère pour l’expertise comptable"
Le Conseil régional de l’ordre des experts-comptables d’Occitanie est sur tous les fronts en cette rentrée, aussi bien pour soutenir la profession que pour continuer la réunion des deux régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. Entretien avec Pascal-Castanet, vice-président du CROEC d’Occitanie, sur les enjeux à venir pour la profession…
Les événements professionnels passés et à venir
Le CROEC Occitanie vient d’organiser le 7 septembre la remise des prix Cré’Acc à 3 entreprises innovantes et méritantes, et de présenter un état des lieux de la situation des PME au travers de son événement Ecozoom, le 9 septembre. Jeudi 16 septembre, il propose un Fiscal Zoom aux experts-comptables. Cette rencontre professionnelle avec des avocats et des représentants des impôts permettra d’aborder des thèmes liés à l’immobilier. Et une assemblée générale du CROEC Occitanie se tiendra le 15 octobre à Toulouse pour faire le point sur les avancées depuis la réunion des deux régions. A un niveau plus large, le 76e Congrès national se déroulera du 6 au 8 octobre à Bordeaux, avec une jauge limitée à 4 500 experts-comptables.
Trois problèmes majeurs pour les entreprises dans la sortie de crise
Concernant la sortie de crise qui se profile, Pascal Castanet rappelle que « dans chaque département, les confrères ont un préfet dédié au comité de sortie de crise. L’Ordre a des représentants dans tous les départements pour aider à piloter cette sortie de crise. Sur le plan départemental, des experts-comptables font partie de la médiation du crédit, pour aider à cette médiation du crédit en cas de problème. Un gros travail a été effectué à ce sujet ». « Cela s’ajoute à l’accompagnement des chefs d’entreprise dans cette période de reconstruction, alors que s’annonce la fin des aides. La profession se mobilise pour prévoir et anticiper. Nous sommes là pour faire des prévisionnels, des plans de relance pour nos clients », explique Pascal Castanet.
Pascal Castanet note que, pour la sortie de crise, les chefs d’entreprise se heurtent à plusieurs difficultés cruciales, outre le remboursement du PGE.
Tout d’abord, le manque de matériel et la pénurie de fournitures et de matières premières. « Des sociétés refusent des marchés par manque de matériel », alerte le vice-président du CROEC Occitanie. « Les secteurs qui utilisent l’acier et le bâtiment enregistrent des décalages de commandes. Je recommande aux chefs d’entreprise de diminuer la durée des devis pour tenir compte des pénuries et des hausses des prix. C’est un point de vigilance à avoir », explique-t-il.
Deuxième problématique : le manque de main-d’œuvre affecte tous les métiers. Les soucis de recrutement tendent à se généraliser, quels que soient les secteurs d’activité.
Le troisième sujet d’inquiétude touche directement la santé physique et psychologique des experts-comptables, et peut potentiellement se répercuter sur les entreprises par effet de rebond : « Depuis mars 2020, notre profession est continuellement sur le pont, et fait face à une activité plus importante qu’auparavant du fait de la crise, tout en ayant des difficultés à recruter. Certains confrères ont eu la Covid – personnellement, je l’ai eue deux fois –, d’autres ont eu des cas contacts parmi leurs collaborateurs et ont dû s’organiser et travailler à flux tendu. Un casse-tête pour l’organisation. Les confrères et collaborateurs sont épuisés. Certains font des burn-out, d’autres ont des problèmes psychologiques. Le CROEC réfléchit à un accompagnement adapté. Nous avons déjà une commission d’entraide pour aider les confrères. Nous allons mettre l’accent dessus lors de l’assemblée générale, car il est impératif que les experts-comptables confrontés à des problèmes psychologiques ne se sentent pas isolés, et qu’ils n’hésitent pas à faire appel à l’Ordre pour obtenir une écoute », assure le vice-président Pascal Castanet. Il ajoute : « Nous sommes en contact avec des psychologues qui peuvent prendre le relais pour aider les chefs d’entreprise à faire face à leur détresse ».
Réunion des deux instituts de formation
Pascal Castanet se félicite : « La réunion des deux régions au sein du Conseil régional de l’ordre des experts-comptables d’Occitanie est de plus en plus effective, ce qui n’est pas toujours évident car les procédures étaient différentes des deux côtés. Nous avons maintenu les événements précédemment des deux côtés. Nous l’avions promis, nous tenons cette promesse. L’harmonisation des procédures se met en place malgré les différences de terrains économiques entre l’est et l’ouest de l’Occitanie. Il s’agit là de compromis, de travail en commun. Cela progresse assez rapidement ».
Le vice-président annonce même un scoop : « la fusion des instituts de formation des experts-comptables de la région a été validée la semaine dernière par le groupe de travail dédié ». Ainsi, de même que les deux CROEC des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées se sont réunis en établissant leur siège social à Toulouse et une représentation territoriale à Montpellier, avec une présidence en alternance, les deux IRF qui forment les experts-comptables en région vont se réunir en 2022. Le siège social de la nouvelle entité sera implanté à Montpellier, avec une représentation territoriale à Toulouse. Au total, 8.500 journées de formations pourront être dispensées. Les confrères auront la possibilité d’être formés à Montpellier ou Toulouse. Un groupe de travail a créé un catalogue commun présentant un panel de formations complémentaires entre les deux sites.
Selon Pascal Castanet, « La réunion des régions avance le mieux possible pour que les confrères ne voient pas la différence, que tout soit transparent pour eux. L’alternance des gouvernances permet l’équité entre les territoires », Freddy Nicolas présidant le CROEC Occitanie jusqu’à fin 2022, et Pascal Castanet reprenant a priori la présidence en 2023-2024. « Le même principe d’alternance s’appliquera à l’institut de formation », indique l’actuel vice-président du CROEC Occitanie. Le but est de « travailler tous dans le même sens », dans l’intérêt de la profession.
Les nouveaux défis du métier d’expert-comptable
Pour l’avenir proche, Pascal Castanet identifie plusieurs challenges que devra relever sa profession.
L’évolution de la profession vers le conseil, du fait de la transition numérique, sera le premier défi, et non des moindres, à relever. « La facture électronique, générée automatiquement par des logiciels, arrivera en 2023. Par conséquent, la saisie comptable va diminuer considérablement au profit d’autres métiers. La disparition progressive de ce travail de saisie laisse désormais de la place aux experts-comptables pour faire du conseil, de la gestion qu’ils n’avaient préalablement pas toujours le temps de faire. Il faut donc que les collaborateurs y soient formés. A titre indicatif, il y a cinq ou six ans, la comptabilité pure représentait 80% des honoraires. Actuellement, elle représente 60%, et dans quelques années, cette proportion passera à 30%. Le point fort sera de compenser par d’autres prestations plus adaptées, comme l’anticipation, une vision sur l’activité des chefs d’entreprise dont ils sont très demandeurs, par ailleurs. En juillet, au domaine des Grands Chais, à Mauguio, l’événement « Cabinet du futur », destiné aux experts-comptables, leur a permis d’imaginer le cabinet de demain au travers de formations sur la cybersécurité, la transition numérique…
Autre défi de taille, rendre la profession d’expert-comptable attractive pour les jeunes, afin de pouvoir recruter de futurs collaborateurs. Le CROEC Occitanie est en train de préparer un travail de communication sur l’attractivité vis-à-vis des écoles et des jeunes pour montrer la réalité du métier et valoriser la marque expert-comptable. Concrètement, un plan de communication sera mené vis-à-vis des jeunes principalement. Très proche du milieu enseignant, Pascal Castanet se dit « conscient que les classes ont du mal à être remplies et qu’il y a un déficit de jeunes dans cette filière ». « Nous sommes en train de sélectionner l’agence de communication qui réfléchira à la meilleure méthodologie pour attirer les jeunes vers nos métiers », indique Pascal Castanet. Le vice-président souligne : « le métier d’expert-comptable évolue et a de l’avenir, en s’adjoignant des compétences en marketing, informatique et gestion de patrimoine par exemple ».
« C’est le début d’une autre ère pour l’expertise comptable, conclut-il. Il ne s’agit plus de faire de la comptabilité traditionnelle, mais d’une ouverture du champ des possibles chiffrée en milliards d’euros ».