Procès Pissarra : à la barre, la mère dit "je suis un monstre" mais n'explique rien
Le moment très attendu de la prise de parole de Sandrine Pissarra a eu lieu ce jeudi 23 janvier à la cour d'Assises de l'Hérault. La mère qui a affamée sa fille jusqu'à la mort a tenté de se défendre, tantôt prenant ses responsabilités, tantôt niant les sévices infligés à Amandine, 13 ans.
“Comme on me décrit, je le suis. J’en ai honte. Je suis un monstre. Je suis monstrueuse, mais jamais je n’ai voulu la mort d’Amandine. Je suis comme ça car je n’ai vécu que de la violence autour de moi.” C’est ainsi que Sandrine Pissarra, qui est accusée d’avoir torturé et affamé sa fille de 13 ans, a terminé son interrogatoire à la barre de la cour d’assises de l’Hérault, ce jeudi 23 janvier. Pourtant, pendant plus d’une heure et demi, elle n’avait pas apporté beaucoup de réponses sur les évènements qui ont conduit à la mort de la petite fille.
“Je la punissais de tout, de tout et de rien”
Alors qu’Amandine était en train de mourir de faim et de soif dans une pièce insalubre qui servait de débarras, “elle vous demandait à boire, elle vous appelait ?”, demande Eric Emmanuelidis, le président de la cour, à Sandrine Pissarra. “Je sais plus”, répond la mère narcissique d’une voix fluette. “Vous alliez la voir dans ce débarras ?” insiste le président avant que la réponse, surprenante, ne glace la salle pleine à craquer : “Oui, c’est là qu’il y avait la machine et le sèche-linge.”
“Je la punissais de tout, de tout et de rien”, admet l’accusée. “Sa vie a été une punition, dix ans de punition et de violences, j’espère qu’elle est mieux là haut”, lui répond le premier magistrat avant de demander si elle souhaitait la mort de sa fille. “Ah non pas du tout, tout ce que vous voulez mais sauf ça !” répond-elle en pleurant. Très vite pourtant, Sandrine Pissarra se replace au centre : “C’était très compliqué pour moi pendant le Covid, avant il y avait une distance entre Amandine et moi, là plus d’internat ensuite arrive juillet. C’était très compliqué pour toutes les deux mais jamais je n’ai voulu lui donner la mort. J’ai vu mais je n’ai pas agi”.
“J’ai connu se coucher avec rien dans le ventre”
En réalité, l’accusée a agi. Elle ne pose pas les mots dessus – à part “j’ai donné des gifles et tiré les cheveux” – mais répond aux questions des différents magistrats. “Faire le ménage nue pour ne pas pouvoir voler à manger, c’est vous qui l’avait décidé ?” “Oui”. “Oui”, comme avec ses autres enfants, Amandine devait passer des heures à faire le ménage et prenait des coups si sa mère estimait que c’était mal fait. “Oui”, elle passait des heures nue, recroquevillée sur elle-même à genoux sur un lino enroulé, “oui”, elle a été privée de nourriture dans une pièce équipée d’un congélateur qu’elle n’avait pas le droit d’ouvrir.
Pour seule explication, Sandrine Pissarra raconte aujourd’hui, pour la première fois depuis le début de la procédure il y a quatre ans, qu’elle était elle-même victime des coups de sa mère. “A partir du CP j’ai été frappée, je ne savais pas lire couramment, ma mère n’était pas patiente, elle me donnait des gifles et des humiliations. Au Portugal, j’ai vécu dans une maison sans eau, sans électricité, sans sanitaire, avec un frigidaire vide et un père absent”. Sous le regard impassible des six jurés qui doivent désormais décider de son sort, elle ajoute, sans saisir l’atroce ironie de cette comparaison : “J’ai connu les engelures aux mains et aux pieds, j’ai connu se coucher avec rien dans le ventre ou presque”… Le verdict est attendu pour vendredi 24 janvier.