René Revol, un appel à l’intelligence collective et à la résistance politique
René Revol est maire de Grabels et vice-président de la métropole aux multiples délégations. Professeur d'économie et militant de longue date, il a su s’imposer comme un fervent défenseur des valeurs de justice sociale et d'écologie politique. La nouvelle édition de son livre « Capitalisme, une mise en perspective » ne nous a pas échappé, en plein effondrement politique et géopolitique. Interview.
Engagé très tôt dans la vie politique, agrégé de sciences économiques et sociales, rencontre avec l’actuel vice-président de la métropole de Montpellier, René Revol, auteur du livre « Capitalisme, une mise en perspective. » Il n’en démord pas : « je suis dans l’action, dans la proposition, dans le fait d’avancer », l’énergie politique est dans son ADN. La réflexion aussi !
« Mon père était gaulliste, » confie-t-il. « Moi, je n’étais pas gaulliste, j’étais à la tête de 68 à Grenoble. » Une alchimie idéale pour faire naître l’intelligence politique, « on se frittait avec mon père, c’était dur, mais c’était le débat avant tout. » Ému par ses souvenirs, René Revol précise : « c’était un gaulliste que je respectais parce qu’il a été gaulliste en novembre 42, c’était un moment où il n’y avait pas grand monde qui devenait gaulliste, je vous signale. »
Long moment de silence, comme pour se nourrir à nouveau de ce passé, il ajoute, « sur la fin de sa vie, il est toujours resté fidèle au parti gaulliste. En 2007, il a pour la dernière fois voté Sarkozy. Avant son décès, on a eu une discussion. Il m’a dit : je reste fidèle à ce que j’ai toujours décidé, mais j’ai peur ! Peur de quoi ? Il me dit : promets-moi, si les Le Pen et leurs sbires arrivent, il faut vous battre, tous ! » René Revol évoque alors « les soi-disant héritiers du gaullisme » dont certains vont s’allier avec le Rassemblement National et dont certains affirment « pouvoir rester neutres » entre un candidat de gauche, et un candidat du RN au moment du choix, dans un second tour. Puis il ouvre une fenêtre sur l’Histoire : « n’oublions pas que 75% de la chambre élue en 1936 a voté les pleins pouvoirs à Pétain et il n’y en a que 25% qui ont résisté. Charles de Gaulle n’est pas resté neutre. » Une question s’impose : René Revol, il faut avoir un père gaulliste pour être un véritable insoumis ? Il répond dans un sourire avec humour, « oui, gaulliste ou communiste. »
« Il faut en appeler à l’intelligence collective et pas uniquement à la peur de l’autre. » René Revol.
« Il faut arrêter de croire que les gens ne peuvent pas comprendre. Et avec cette campagne même rapide que nous avons devant nous : il faut en appeler à l’intelligence collective et pas uniquement à la peur de l’autre, » insiste-t-il. Ce co-fondateur du Parti de Gauche en 2011, avec Jean-Luc Mélenchon investi depuis 2016 avec la France insoumise fait cette analyse : « on est face à un capitalisme global qui entraîne la civilisation humaine à sa perte, il faut une réponse humaniste globale. »
Dans « Capitalisme, une mise en perspective », l’auteur prévient : « la crise du capitalisme se conjugue avec une mise en danger de l’écosystème humain et pose la question de sa survie. » La connaissance et la maîtrise de ce système économique sont les outils indispensables pour ouvrir de nouvelles voies face aux défis du monde contemporain. René Revol fustige la « mondialisation heureuse, mondialisation économique, mondialisation sociale, mondialisation culturelle, diplomatique, tout allait s’arranger par la mondialisation. Mais à l’époque toute la croissance économique était fondée sur des artifices financiers et des dettes gigantesques… »
« Le programme du Nouveau Front Populaire… C’est un programme qui prépare le dépassement du capitalisme. » René Revol.
Pour le responsable politique qu’il est, il faut commencer à se projeter hors de ce système. « Aujourd’hui, on est dans une situation, où une bonne partie de ce que nous avons préparé peut se réaliser si nous saisissons l’occasion historique. Et cette occasion historique, elle nous a été donnée par Emmanuel Macron, avec sa dissolution surprise. » René Revol l’insoumis aux racines gaullistes en est convaincu « le programme du Nouveau Front Populaire est un programme historique de gauche. Il répond à la situation. Pour le moment, c’est un programme d’urgence face à une crise sociale majeure et je le conçois comme tel. C’est un programme qui prépare le dépassement du capitalisme. »
Si l’instabilité mondiale est aussi alimentée par des tensions croissantes entre grandes puissances, notamment les États-Unis, la Chine et la Russie, qui façonnent un environnement géopolitique de plus en plus toxique et multipolaire, la montée en puissance des technologies de l’information, de l’intelligence artificielle, avec la diffusion de fausses informations, exacerbent les tensions sociales et politiques, et laissent les populations face à un abîme idéologique. Élu dans l’Hérault, René Revol en est conscient : « je vous parle de l’avenir de l’humanité, sur le très long terme, sur le siècle, et d’un seul coup je nous ramène aux quelques jours qui sont devant nous. Mais on voit se concentrer, en un précipité dans ces quelques jours, des enjeux qui sont les enjeux du siècle. Voilà, c’est là, le paradoxe de la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui dans cette interview. »