Sète : Solarinblue met à l’eau son 1er module de ferme solaire offshore
Ce module est le premier sur les 25 prévus. Le 17 mars, en présence d’élus et de professionnels du territoire, la société Solarinblue a lancé cette ferme solaire offshore, une première en France.
Il a été procédé à la mise à l’eau de ces deux premières unités solaires flottantes en pleine mer, conçues en France et fabriquées en région Occitanie, de la ferme solaire qui alimentera en électricité le port de Sète-Frontignan. Ce projet se nomme Sun’Sète. Armand Thiberge, fondateur de Solarinblue, a inauguré les prises de paroles : « cela fait quinze ans que je suis entrepreneur, et je dis souvent à mes équipes ‘aujourd’hui est le premier jour’. C’est particulièrement vrai ce 17 mars puisque c’est la première fois qu’une ferme photovoltaïque offshore est mise à l’eau en France et en Méditerranée. De 300 kWc avec ce démonstrateur, nous voulons en 2030 avoir installé plus de 1 GWc de solaire offshore. C’est l’aboutissement de trois ans de R&D, d’ingénierie, de nuits de travail, d’essais en bassin. À l’origine de cette idée est que l’énergie solaire est la plus abondante sur terre, la moins chère de toutes les énergies et représente le plus gros potentiel de réduction des gaz à effet de serre. L’avantage sur la mer, c’est que ces fermes n’ont pas d’impact sur le paysage et que l’on peut construire des gigas fermes. » Il a rencontré Antoine Retailleau, le cofondateur, quand il avait 15 ans, au club des minifusées. Le fondateur a remercié la Région Occitanie, « sans qui rien n’aurait été possible », le port de Sète-Frontignan, l’Ademe, Evolen, l’ensemble des partenaires et Aurélien Croq, directeur général et opérationnel, ainsi que son équipe.
Une start-up technologique
SolarinBlue a conçu une technologie de parc solaire photovoltaïque flottant adaptée aux conditions de la pleine mer. Le projet Sun’Sète a été développé à partir de 2021. Il a obtenu l’aval des autorités portuaires et l’ensemble des autorisations administratives en 2022, à l’issue d’une étude d’impact. Le démonstrateur sera composé de 25 unités flottantes pour une puissance totale de 300 kWc sur 0,5 hectare. Les structures seront progressivement installées sur le port de commerce, à 1,5 km de la côte, à l’emplacement de l’ancien poste de déchargement des hydrocarbures en mer. L’énergie produite par les panneaux solaires, acheminée par un câble sous-marin, alimentera en électricité renouvelable les infrastructures du port de Sète-Frontignan. La production est estimée à 400 MWh par an, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 200 personnes.
Antoine Retailleau, le cofondateur, s’est dit « fier de présenter ce résultat ». « Nous avons designer une structure assez robuste et légère, capable de résister à des houles de plus de 10 m, à des vents de plus de 200 km/h, et nous avons surélevé les panneaux à 3 m du niveau de la mer. Nous avons travaillé sur la pérennité de nos installations, nous pourrons produire avec ces modules pendant une période de trente ans. Cette technologie est économique et écologique. La structure est écoconçue et recyclable à 95 %. Au niveau de l’ancrage, la technologie est innovante et permet d’être très peu impactante sur le milieu. Chaque ancrage occupera une superficie au sol de moins de 1 m², sans phénomène qui détériorerait les fonds marins ». Il conclut : « Sun’Sète est une vitrine technologique qui va nous permettre de valider un certain nombre de concepts technologiques au service des consommateurs, du port et à notre développement ».
Un projet occitan
Une vingtaine de personnes ont pris part au développement de la technologie SolarinBlue : ingénieurs en structures mécaniques, hydrodynamiciens, architectes navals et roboticiens ont consacré deux années de recherche et développement au projet. Le démonstrateur a été fabriqué et assemblé sur le port de Sète par des entreprises de la région. Une trentaine d’entreprises d’Occitanie ont été mobilisées pour les études environnementales, la fourniture de matériaux, l’assemblage, la logistique et les tests d’un ancrage innovant et écologique. L’ensemble du projet s’inscrit dans la stratégie de décarbonation du port de Sète et ses objectifs à 2025 d’autoconsommation.
Philippe Malagola, président du Port de Sète, a rappelé les investissements du port dans les enjeux de décarbonation : « nous sommes très fiers d’être à vos côtés et de vous accueillir sur notre port. Ce projet est en totale continuité avec le projet photovoltaïque que nous avons mis en place depuis une dizaine d’années, en parfait accord avec notre politique d’innovation et de développement durable. Il est également en osmose avec la politique écologique de la Région Occitanie, notamment la protection de l’environnement, la transition énergétique. Depuis 2020, après huit années d’équipement de nos toitures en photovoltaïque, nous sommes devenus un port à énergie positive : 64 000 m² de panneaux produisant l‘équivalent de 2,5 fois la consommation du port. Notre projet photovoltaïque phase 2 va implanter plus de 20 hectares supplémentaires d’ombrières sur la partie gagnée sur la mer sur la ville de Frontignan ». L’un des objectifs est d’installer des bornes de recharge alimentées par ces panneaux solaires pour recharger les véhicules électriques importés. Le président complète : « sur le bassin Orsetti, nous avons commencé l’installation de branchements électriques à quai et nous avons l’objectif d’équiper les quais des lignes régulières de ferry à fin 2023. Les navires à quai n’auront plus besoin d’utiliser leur moteur diesel en se branchant sur le réseau électrique. Le port accueillera les prochaines Assises du port du futur en octobre 2023, et les journées méditerranéennes ».
Sébastien Denaja, conseiller régional, a souligné : « ce port est très important pour toute la Région, emblématique du Pacte vert qui irrigue toutes les politiques régionales. C’est une grande ambition de Carole Delga de faire de notre région ‘La’ région de la transition énergétique et écologique. Nous avons ici des spécialistes d’énergie. Notre ambition régionale est d’être exemplaires en termes d’énergie positive au niveau européen à l’horizon 2050. Ici, c’est tout à la fois l’économie bleue, les énergies renouvelables. Vous avez parlé de la R&D dans votre parcours. Nous sommes la première région en Europe et investissons 3,5 % de notre PIB en R&D ». L’élu a prévu d’accompagner Solarinblue dans son développement à l’international. Il ajoute : « au moment où vous en êtes à la mise à l’eau, vous êtes également beaucoup regardé par la filière conchylicole et par la filière de la pêche. On imagine déjà, sans être spécialiste, qu’un tel équipement pourrait être créé en synergie avec d’autres potentialités. La question de l’éolien flottant ou du solaire flottant, il faut aussi bâtir tout cela dans un esprit de dialogue constructif avec tous les acteurs de la communauté des gens de mer ».
Du ‘gros bon sens’ pour l’Ademe
SolarinBlue a remporté le soutient de l’Ademe dans le cadre de l’appel à projets PME-TASE (Technologie Avancée des Systèmes Énergétiques) pour le développement de briques technologiques par des PME pour les systèmes énergétiques. Le projet a également été accompagné par le programme d’innovation CITEPH pour les projets innovants mis en œuvre et coordonné au sein de l’association Evolen, et a été soutenu par la Région Occitanie.
Camille Fabre, directeur régional délégué de l’Ademe Occitanie, a indiqué : « je voulais saluer la façon dont ce type de projet s’intègre dans une dynamique territoriale. Au niveau national, les scénarios de l’Ademe indiquent que nous devrons passer de 13 GW aujourd’hui à entre 92 et 176 GW. C’est un facteur 10 en trente ans. En Occitanie, nous sommes à 3 GW installés de photovoltaïque pour un objectif à 2030 de 7 GW. L’agrivoltaïsme génère des interrogations sur la coexistence entre les pratiques agricoles, la consommation du foncier et le développement de cette énergie. Nous avons soutenu ce projet de Solarinblue à 45%, sur le plan financier. Nous devons investir nos façades maritimes pour atteindre nos objectifs ambitieux. Nous essayons de voir comment mutualiser les infrastructures, nous investiguons sur les colocalisations. Il faut raccorder vos installations et pourquoi ne pas raccorder en même temps d’autres projets ? C’est juste du gros bon sens. » Le directeur régional a également souligné que ce territoire est dans un écosystème au cœur de l’économie circulaire et des questions de transition énergétique. Il a illustré ce qu’il appelle le GBS (gros bon sens) avec « l’UVE fera que la chaleur de l’unité d’incinération sera valorisée avec un tuyau de 1,5 km qui va alimenter Saipol, entreprise qui fabrique des biocarburants. Tout cet écosystème, toute cette logique, à l’Ademe, c’est ce que l’on appelle l’écologie industrielle et territoriale. C’est un grand mot, mais en fait, c’est du GBS : l’énergie de l’un est la ressource de l’autre. »
Le projet Sun’Sète
Aurélien Croq a détaillé : « le solaire photovoltaïque flottant tel que nous l’envisageons, écologique, durable et compétitif, a vocation à trouver sa place dans le mix énergétique des zones côtières, partout dans le monde. Le potentiel se chiffre déjà en milliers de GW sur la planète et plus de la moitié de la population mondiale réside à moins de 150 km d’une côte. Nous visons les installations portuaires, les zones côtières densément peuplées, les îles et systèmes insulaires. Nous nous appuyons sur plusieurs avantages : un investissement minimal, des opérations marines parmi les plus simples, un coût de revient très compétitif et un très faible impact environnemental. Nous voulons fournir une électricité renouvelable, partout où le foncier est contraint, et une électricité non carbonée ».
Unité flottante :
- Dimensions : L =12m, l = 9m, h = 3,5m
- Structure treillis en acier galvanisé marine
- Flotteur en PEHD recyclé
- Capacité de 20 panneaux solaires par unité
- Puissance photovoltaïque de 10 kWc par unité
Caractéristiques du site d’essai :
- Distance de 1,5 km de la digue
- Profondeur de l’eau de 15 m
- Fond marin sableux
Ancrage :
- Ancrage tendu en lignes synthétiques
- Ancres hélicoïdales écologiques
- Redondance des lignes d’ancrage