St-Eutrope, esprit de la montagne
La chapelle de Saint-Eutrope, accrochée à la roche comme un vaisseau fantomatique, semble surgir des nuages. Son apparition est presque furtive, noyée dans le relief, prête à disparaître pour qui n’y prête pas attention.
De roche et de ciel
L’histoire de ce lieu remonte aux premiers siècles du christianisme, quand un ermite, dont la réputation de sainteté traversa les âges, s’y installa. Ce n’était pas simplement un abri, mais un sanctuaire, un lieu de prière où le silence était roi. Le nom de Saint-Eutrope, qui résonne encore dans les échos des montagnes, est indissociable de ce refuge. Et le panorama qui se dévoile au sud de la chapelle est un enchantement. À ses pieds, un vallon verdoyant, qui déjà se pare des couleurs de l’automne, une mer de feuilles qui se décline entre l’orange, le rouge et le marron. La vue étend ses bras vers la montagne de Sète, vers la mer bleue qui scintille au loin, et vers les Pyrénées, immenses et tranquilles. Un peu plus loin, l’ombre du Caroux, à peine effleurée, révèle les gorges d’Héric, comme une invitation à l’aventure, à la découverte de paysages plus secrets encore.
La construction actuelle, datée du XIVe siècle, a remplacé un édifice plus ancien, peut-être pré-romain. Mais le site, par son isolement et son authenticité, porte les traces d’un passé encore plus lointain. Au fil des siècles, il est devenu bien plus qu’un simple lieu de culte : un lieu de mémoire, un refuge, un espace où l’esprit se libère. Depuis les années 1980, après une restauration minutieuse, il est à nouveau accessible, mais toujours aussi rude à atteindre.
Vertige de l’Espinouse
Ce n’est pas un lieu qu’on atteint en flânant. La chapelle de Saint-Eutrope, suspendue sur le flanc nord de l’Espinouse, proche du village de Castanet-le-Haut, n’est pas pour les âmes paresseuses. Pour y accéder, il faut prendre un sentier escarpé, gravir plus de 300 marches taillées dans la roche, puis s’attaquer à l’ascension finale, vertigineuse. Le chemin, sommaire, de dalles et de pierres, semble suspendu dans le vide. Mais à chaque pas, la récompense se fait plus grande.
Plus loin, au-delà de la chapelle, un autre monde s’ouvre. Un chemin, à peine esquissé, part à l’assaut de l’Espinouse. La crête s’élance, tourmentée, coupée, sauvage. Une randonnée hors des sentiers battus, loin de la foule, loin des préoccupations mondaines. L’ascension vers le sommet, à 1024 mètres, est une épreuve. La roche, les arêtes, les goulets étroits, tout met à l’épreuve les mollets et l’esprit. Mais chaque pas sur cette terre indomptée est une récompense. La nature ici est sauvage, rude, mais belle.