[VIDEO] Conseil de Métropole de Montpellier, affaire n°10 : et si l’histoire d’Amétyst était sans fin ?
La majorité PS qui gouverne la métropole de Montpellier veut créer une unité CSR (Combustible Solide de Récupération). Elle vient, ce 2 avril 2024, de lancer la procédure de mise en concurrence, pour faire évoluer le site Amétyst en unité CSR.
Il faut comprendre que l’EPCI Métropole Montpellier Méditerranée n° de siret 243 400 017 00022 invite différents fournisseurs, prestataires ou entrepreneurs à soumettre des propositions pour la réalisation de cette nouvelle Amétyst. Après un vote en juillet 2025, si le vote est majoritaire, il sera donc acté que cette usine se fera au 230, rue Raymond Recouly à Montpellier.
Affaire Numéro 10 : « Exploitation du service public de traitement et de valorisation de déchets ménagers et assimilés par méthanisation et valorisation énergétique sur le site de l’unité Ametyst. Définition du périmètre du service et du choix du mode de gestion et lancement de la procédure de mise en concurrence. » C’était l’intitulé à l’ordre du jour. Elle a été adoptée avec 71 votes pour, 11 votes contre et 10 abstentions.
Avant même l’appel, en entrée de séance, Renaud Calvat qui présidait ce conseil a annoncé que le Président Michaël Delafosse a confié la délégation sur la gestion de déchets à René Revol maire « expérimenté » de Grabels et vice-président, délégué à la Gestion raisonnée, écologique et solidaire de l’eau et de l’assainissement.
Les Écologistes votent contre l’ordre du jour et contre le Budget
Dans son intervention sur l’affaire 2 qui concerne le budget de la métropole, Coralie Mantion demande le retrait de l’affaire 10 « personne ici dans cet hémicycle n’a été élu pour construire un incinérateur, c’est pour cela que nous avons voté contre l’ordre du jour. » La vice-présidente annonce aussi : « après 4 ans de mandat, le modèle ne change pas […] le budget ne permet pas de tourner la page de l’urbanisme et de la bétonisation, nous ne préparons pas assez notre territoire au choc du dérèglement climatique. Les Écologistes voteront donc contre ce budget ! » Et ils confirment leur volonté de mettre en place une votation citoyenne sur les orientations concernant la gestion des déchets. À sa prise de parole, Jean-Luc Meissonnier, maire de Baillargues fulmine : « en conseil municipal quand, un adjoint vote contre, il démissionne, » et ajoute « Coralie Mantion en votant contre devrait nous rejoindre dans l’hémicycle. »
[VIDEO] Interview avec Coralie Mantion, quel est son avenir au sein de la majorité PS de Michaël Delafosse ?
« Cette responsabilité qui me tombe dessus est lourde » René Revol
Arrive la fameuse affaire numéro 10, celle qui dira plus tard si « la malédiction » d’Amétyst se poursuit ou pas ? Fraichement héritier de la délégation sur la gestion de déchets, René Revol s’exprime « cette responsabilité qui me tombe dessus est lourde. » Il confiera aussi les mots d’un ami à son oreille : « tu ne devrais pas prendre ce dossier c’est un dossier de merde ! »
Mais l’homme de Grabels est en mission, la politique c’est son affaire. « Je serai disponible pour avancer, pour travailler […] je salue le travail de Mr Vasquez, quelles que soient nos divergences […] C’est avec le sens de la responsabilité collective qu’il faut travailler ». Cet insoumis, suppléant de Nathalie Oziol députée l’Hérault, aime les défis. Et il le sait : « nous n’avons pas les moyens de faire une régie pour ce qui concerne les déchets […] Nous sommes contraints de reprendre cette filière en DSP. » Culture politique oblige, l’élu promet : « avec l’ouverture du cahier des charges… la mise en place d’un comité de suivi, avec pourquoi pas des citoyens tirés au sort, on sait faire, » assure-t-il. Il affirme aussi être « ouvert à tous pour faire face à un dossier difficile, un dossier dur. » Mais René Revol sait apaiser aussi, il se pose presque en sage et tient à faire comprendre à l’assemblée : « On ouvre un processus de DSP. Et c’est en juillet 2025 où vous voterez. Et si les réponses ne vous correspondent pas, vous voterez contre. » Bref ! Après le constat du : « nous sommes face à un mur écologique, » action !
[VIDEO] Interview avec René Revol :
François Vasquez reprend René Revol « la fière CSR est dans l’échec depuis 25 ans et elle n’existe que dans le secteur industriel… Le problème c’est l’urgence, on ne peut pas prendre de décision dans l’urgence. » L’ex-vice-président note aussi : « après 4 ans d’inaction, on sort un incinérateur du chapeau qui l’a décidé ? »
[VIDEO] Interview avec François Vasquez :
Guy Lauret, maire de Vendargues, prône le « pragmatisme et la prospection » et se dit favorable à cette délibération. Il espère que ce process soit la solution pour stopper « l’export de nos déchets chez nos voisins. » Côté Manu Reynaud, l’exclu d’EELV « j’ai posé 38 questions… j’ai eu des réponses hier. » Pour Alenka Doulain il y a « un manque de choix, et la majorité impose un process couteux, sans autre alternative. » La conseillère métropolitaine dénoncera aussi un « gouffre financier » et un « cadeau aux industriels. » Sans omettre de souligner que la collectivité « ne respecte pas la loi sur les bio-déchets. »
« Quid de la fiabilité économique de ce projet ? » S’interroge Salim Jawhari, conseiller de Montpellier Méditerranée Métropole qui remplace Mohed Altrad. Idem pour Luc Albernhe, « la rentabilité n’est pas assurée […] le dossier n’est pas prêt. » Si Philippe Saurel apprécie les échanges de « grande qualité », il précise « qu’il n’y a pas assez d’éléments en Santé publique » et tient à annoncer : « je m’abstiendrai ! »
Coralie Mantion rappelle que l’Ordre des médecins de Haute-Loire parle de « mortalité en lien avec ces projets » de CSR. « Projet dangereux pour la génération future », renchérit Catherine Ribot, et elle ajoute : « l’argument des filtres sur les cheminées ne marche pas, nous ne connaissons pas aujourd’hui, tous les polluants qui vont être émis. Cette filière est une aberration politique. » La conseillère veut alerter que sur ce choix : « aujourd’hui les citoyens ne sont pas au courant. »
Pour Tasnime Akbaraly qui affirme avoir lu la littérature étrangère sur le sujet des usines CSR, aucun doute, tout irait bien, et elle s’adresse à l’opposition : « vous créez de la confusion » et « vous agitez le chiffon rouge de la peur. »
Les CSR sont obtenus par le traitement de déchets dits non dangereux sélectionnés et préparés en combustibles, pouvant être utilisés dans divers processus de production d’énergie. Simple ? Pas vraiment ! La fabrication de CSR implique des procédures de tri, de séparation, et parfois de traitement (comme le séchage ou la granulation) des déchets, pour produire un combustible qui respecte certaines normes de qualité en termes de pouvoir calorifique, d’humidité, et de composition.
Prendre des décisions éclairées pour le bien commun, tout l’enjeu est là, en ce mardi d’avril et pour les 15 prochains mois, dans l’hémicycle de la métropole. Pour mieux comprendre la situation sur ce choix de l’évolution (ou de la transformation) de la Délégation de Service Public (DSP) d’Amétyst et le développement d’une filière CSR, il faut s’accorder un léger retour sur ce qui s’est passé en mars, dernier.
Mars en Métropole, le temps de la réflexion ?
Dans le cadre d’un travail d’information s’est tenue une première audition, dans la salle du Conseil, en présence de Catherine Marquet d’Antea Group, d’Agnès Langevine, Vice-Présidente de la Région Occitanie, et de Pierre Vignaud, expert à l’ADEME. L’intégralité des échanges est à retrouver ici.
Souvent ce sont les questions pertinentes et bien ciblées qui révèlent toutes les dimensions invisibles ou cachées d’une problématique. Ces questions ont été posées par Florence Brau, Vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole, déléguée à la Santé, Recherche, Enseignement supérieur, et Maire de Prades-le-Lez.
Pollution, et santé « encombrants, mousse, bois, plastiques, polystyrènes utilisés », quid des « émanations et des risques ? » « Quel est le coût total du CSR ? » « Entre les filières industrielles et le chauffage urbain, le modèle prévu ici a-t-il été testé, est-il adapté ? » Puis la maire de Prades le Lez souligne « qu’avec 56.000 tonnes par an de refus qui ne pourraient pas être traités dans la filière CSR, on va continuer à avoir du trafic de camions, il ne faut pas se leurrer ! »
[VIDEO] Intervention de Florence Brau, lors de la 1re audition du 1er mars 2024 pour le traitement et la valorisation des déchets en filière CSR :
Normes, pollution, l’État contrôle !
Un autre élu semblait inquiet pour la pollution, c’est Christian Assaf, Vice-président de Montpellier Méditerranée Métropole, délégué aux Politiques sportives. Il s’adresse à Pierre Hirtzberger, directeur Général des services techniques chez SYCTOM le 21 mars, lors de la 2e audition pour le traitement et la valorisation des déchets en filière CSR : « sur la mesure des fumées et sur toutes les questions autour de santé publique, autour des fumées qui s’échappent de ces usines. J’aurais voulu savoir combien de fois vous avez eu des accidents, est-ce qu’il y a eu de nombreux arrêts ou alertes pour des taux dépassant les normes ? » M. Hirtzberger l’a vite rassuré.
[VIDEO] Intervention de Christian Assaf, lors de la 2e audition du 21 mars 2024 pour le traitement et la valorisation des déchets en filière CSR et réponse de Pierre Hirtzberger :
« En politique, je déteste ne pas avoir le choix. » Manu Reynaud
Manu Reynaud, conseiller de Montpellier Méditerranée Métropole, adjoint au Maire de Montpellier, semblait lui aussi assez ennuyé : « je suis un peu gêné réellement qu’il n’y ait pas de scénarios alternatifs sur les process industriels parce que je retiens de cette présentation que nous n’avons pas le choix. Moi en politique je déteste ne pas avoir le choix. »
[VIDEO] Intervention de Manu Reynaud lors de l’audition du 1er mars 2024 pour le traitement et la valorisation des déchets en filière CSR :
Sans aucun doute, les 92 élus de la métropole de Montpellier, vont pouvoir au fil des jours et des mois qui suivront ce 2 avril 2024, expliquer à leurs administrés leurs votes sur l’affaire n°10, avec toute la pédagogie qu’il convient à un citoyen mandaté pour représenter tous les autres. Et comme dirait René Revol : « personne n’a le monopole de l’écologie politique ! »