[VIDEO] Montpellier, violences conjugales : “Aucun d’entre nous n’est un sauveur, aucun d’entre nous ne peut agir seul”
Demain, samedi 25 novembre, le monde descendera dans la rue pour marquer son soutien à la lutte contre les violences faites aux femmes. Alors que les féminicides augmentent, témoignant d'une réponse inadéquate, et que les plaintes se multiplient grâce à la libération de la parole, nous avons interrogé Aline Faucherre, une force motrice dans la lutte et présidente du Centre d’information des droits des femmes et des familles de l’Hérault.
Des évolutions conséquentes mais toujours trop lentes
Les chiffres sont alarmants : 95 féminicides en France au 17 novembre 2023. “Une actualité tragique qui prouve une fois de plus que, malgré l’impact du mouvement Me Too et l’éveil des consciences, les violences faites aux femmes continuent de sévir”, déplore Aline Faucherre, présidente du CIDFF de l’Hérault depuis 2021, avant de poursuivre sur les évolutions positives de ces dernières années. “Sur la question des violences faites aux femmes, le CIDFF est engagé depuis le début des années 1990. A cette époque, nous étions vraiment à l’aube d’une compréhension de ce phénomène comme étant un problème de société, un phénomène systémique de domination des hommes sur les femmes. Chez les professionnels, il y avait de l’incompréhension, de la lassitude, beaucoup de choses à construire. Rapidement, nous avons commencé la formation des professionnels, et aujourd’hui, nous constatons de réels progrès.”
Pour la présidente du CIDFF de l’Hérault, si la situation reste accablante, d’importants bouleversements ont permis de “chasser la culture viriliste” et d’améliorer la compréhension des faits de violences”. Elle explique : “Aujourd’hui, les femmes victimes ne sont plus considérées comme des cas sociaux, ce ne sont pas des femmes qui aiment ça. Le 15 novembre, j’étais à la préfecture de l’Hérault pour discuter des progrès en matière de prise en charge, le fait est que, même s’il reste des poches de résistances, une réelle évolution est en cours. Bien sûr, il y a de la lassitude, un manque de personnel, un manque de temps, ils l’évoquent dans chacune de nos réunions, mais en trente ans, des avancées significatives ont été réalisées. Cela est dû à la formation, mais aussi à l’évolution de la société dans son ensemble. Pour moi, deux moments ont été déterminants au cours des dernières années : MeToo et la présence des intervenantes sociales dans les commissariats et gendarmeries depuis 2015, qui réorientent vers les acteurs appropriés, en toute indépendance et en construisant une relation de confiance”.
Le CIDFF, une oreille, un soutien
Ce qui distingue l’intervention du CIDFF, selon Aline Faucherre, c’est sa “prise en charge globale” des personnes touchées par les violences conjugales. “Les violences prennent différentes formes, physiques bien sûr, mais aussi psychologiques, sexuelles, et administratives. Pour lutter efficacement contre ces violences, il est important d’accompagner les victimes dans la pluridisciplinarité. Aucun d’entre nous n’est un sauveur, aucun d’entre nous peut agir seul. Au CIDFF, quand une femme vient nous rencontrer, nous adoptons une approche globale de ses difficultés, en tenant compte de sa situation. A-t-elle besoin d’informations sur ses droits ? D’un soutien psychologique en raison des violences qu’elle a subies ? Doit-elle chercher un emploi ou suivre une formation parce qu’elle a arrêté de travailler ou parce que son conjoint le lui interdisait ? C’est vraiment une approche au plus près des besoins de chaque personne.”
Conseils juridiques, soutien psychologique, relais avec des informations spécialisées, le Centre d’informations répond à l’urgence de bien des façons, mais son accompagnement se poursuit à l’heure où la victime souhaite avancer, s’exprimer, se retrouver aussi. Pour cela, la présidente du CIDFF de l’Hérault partage sa croyance dans le pouvoir du collectif, dans la puissance d’organiser des activités de groupe : “Nous pensons qu’être avec d’autres personnes permet de prendre conscience de l’aspect systémique de ces violences. Le fait d’appartenir à un groupe permet de ne pas porter de culpabilité parce qu’on comprend plus facilement que ce qui nous est arrivé n’a rien de normal. Nous nous appuyons beaucoup sur la dimension groupale, qui permet de sortir du silence, de l’isolement et de reprendre du pouvoir sur sa propre vie.”
Marche du 25 novembre à Montpellier
Demain, samedi 25 novembre, Aline Faucherre et le CIDFF de l’Hérault, ainsi que les autres associations qui luttent contre les violences faites aux femmes et ceux qui souhaitent faire entendre leur voix seront à l’esplanade du Peyrou, dès 14h30, pour marquer une fois de plus la date concédée à ce phénomène dans le monde entier.