Villeneuve-lès-Maguelone : le domaine handi-solidaire de Maguelone dresse le bilan de ses vendanges
Implanté dans un cadre exceptionnel, entre terre, mer et étangs, le domaine de Maguelone est aujourd’hui le 6e site le plus visité du département. Autour de sa cathédrale romane du XIIe siècle et de son restaurant handi-solidaire, un océan de vigne vient solidifier la renommée des lieux.
Crédit photo : R. Negri
Organisées de fin août à mi-septembre, les vendanges de l’impressionnant domaine se sont révélées faibles cette année, malgré l’absence de gel. Une tendance qui s’est confirmée aux quatre coins de la France.
Malgré tout, le millésime 2021, annoncé plus concentré en fruit, viendra grossir les étagères de sa cave pour révéler à son tour les caractéristiques emblématiques de cette terre millénaire.
Un domaine viticole d’exception
La presqu’île de Maguelone est une terre ancestrale. Ancien volcan, elle fut occupée dès l’âge de Bronze, en témoignent les quelques vestiges d’habitats retrouvés pendant les campagnes de fouilles. Habitée régulièrement à partir de l’Antiquité, elle a connu son apogée au XIIe et XIIIe siècle, période pendant laquelle sa cathédrale-forteresse sert de siège de l’évêché de Maguelone. Bastion de la papauté en Languedoc, la prestigieuse cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul fut à maintes reprises le refuge des papes de Rome, un passé qui lui a valu d’être classée au titre des monuments historiques dès 1840.
Propriétaire des lieux à partir de 1852, la famille Fabrège a fait don du domaine à l’Évêché de Montpellier en 1949, avec comme obligation d’en faire une œuvre sociale. En 1969, l’institution religieuse a confié le terrain à l’association “les Compagnons de Maguelone”, qui gère depuis la cathédrale et l’environnement insulaire, classé Natura 2000. Depuis le début de sa gestion, elle s’attache à accompagner les personnes en situation de handicap en leur proposant des activités professionnelles et l’hébergement. Au fil du temps, les “Compagnons” ont mis en valeur le potentiel naturel de l’écosystème, en intégrant les personnes accompagnées dans tous les aspects de leur activité.
11 cépages et 6 cuvées
C’est l’arrivée de l’association en 1969 qui a permis de transformer les friches de la presqu’île en terres cultivables. De nos jours, la viticulture occupe 18 ha du domaine et, chaque année, le vignoble produit entre 400 et 750 hl, soit un rendement d’environ 40 hl/ha et un potentiel de près de 80 000 bouteilles.
Relancé dans l’idée de représenter le terroir du Languedoc, il héberge une variété de cépages blancs et rouges. Ils sont au nombre de onze : vermentino, picpoul, clairette, chardonnay, viognier, syrah, merlot, cabernet sauvignon, grenache, cinsault et petit verdot.
Les personnes en situation de handicap, soutenues par les “Compagnons de Maguelone”, participent à toutes les étapes de la production : culture, vendange, mise en bouteille et commercialisation. Leur travail donne naissance à une gamme de vins bio dénommée “Les 3 Anneaux”. Elle se décline en six cuvées – un rosé, deux blancs et trois rouges – et sous trois noms : “Insula”, “La Volta” et “Witiza”.
Chacun d’entre eux fait référence à une période de l’histoire de Maguelone :
- “Insula” provient de “insula Magalona”, le nom que donnaient les Romains au site de Maguelone
- “La Volta” tire son origine de l’occitan, le mot a d’ailleurs une double signification puisqu’il signifie à la fois « la voûte » et « le labour », un hommage au patrimoine architectural et à l’activité agricole des lieux
- “Witiza” tient son nom du fils du comte wisigoth de Maguelone, plus connu sous le nom de Saint Benoît d’Aniane, considéré comme le pionnier des vignobles des coteaux du Languedoc.
Le premier d’entre eux est labellisé “IGP Pays d’Oc” et proposé en rouge (Syrah 40 % – Merlot 40 % – Petit Verdot 20 %), rosé (Syrah 100 %) et blanc (Vermentino 35% – Picpoul 45 % – Clairette 20 %). “L’Insula blanc” est issu d’un assemblage unique, c’est aussi une des rares cuvées qui est légèrement saline.
Également labellisé “IGP Pays d’Oc”, “la Volta” est disponible en blanc (Chardonnay 30 % – Viognier 70 %) et en rouge (Syrah 40 % – Merlot 40 % – Cabernet Sauvignon 20 %). Le “Witiza”, proposé uniquement en rouge (Syrah 80% – Grenache 20%), est quant à lui labellisé “AOP Languedoc”.
Au total, la production du domaine se compose de 40% de blanc, 40% de rouge et 20 % de rosé. L’ensemble est par ailleurs distribué sous la marque ombrelle régionale “Sud de France”.
Une production en pleine évolution
Afin de préserver le patrimoine historique et naturel du domaine, l’activité viticole se fait en agriculture biologique depuis 2014. Aujourd’hui, le passage en biodynamie est en réflexion. Ecoresponsable, le domaine applique déjà quelques dispositifs qui vont dans ce sens : traitements effectués selon le calendrier lunaire, soufre utilisé a minima (en dessous des seuils imposés en AB), le labour est pratiqué sur une rangée sur deux ou trois…
Pour faire face au changement climatique et que la terre soit préservée au maximum, l’exploitation pense également incorporer l’agroforesterie et l’utilisation de cépages résistants. Une démarche d’adaptation qui leur permettrait de s’assurer que les cultures restent pérennes.
L’autre ambition du domaine en matière de viticulture est liée à l’embouteillement. Actuellement, une partie de la production est embouteillée sur place mais les deux tiers sont vendus en vrac à des négociants. Pour Maguelonne Arghyris, chargée de communication aux “Compagnons de Maguelone”, l’objectif est clair : “On veut passer à 100 % de bouteilles pour ne se concentrer que sur la vente directe dans notre magasin de la presqu’île et au Domaine du Grand Puy, que nous avons ouvert en octobre 2019, ainsi que chez quelques cavistes triés sur le volet et sur notre boutique en ligne”.
Le développement durable au cœur du projet
Aujourd’hui, l’association “les Compagnons de Maguelone” accompagne 117 personnes en situation de handicap et les intègre dans toutes les étapes de la vie du vin, de la vigne à la vinification, en passant par la mise en bouteille et la vente. Accueillies à l’Esat (Établissement et service d’aide par le travail), elles interviennent sous la direction de Bruno Brante, chef de culture et maître de chai.
Loin de se contenter des axes économiques et sociaux du principe du développement durable, l’organisme a ajouté des problématiques patrimoniales et humaines dans sa définition.
Depuis plus de 50 ans, son activité repond à ces principes et s’articule autour de trois missions essentielles :
- la mission patrimoniale, par la préservation et la mise en valeur du patrimoine bâti et de l’environnement naturel unique
- la mission culturelle, en proposant des festivals et rendez-vous culturels (expositions, visites œnotouristiques…)
- la mission médico-sociale, en accueillant et en accompagnant des personnes en situation de handicap dans leur projet professionnel.
Pour Maguelonne Arghyris, toutes ces dimensions se justifient les unes par rapport aux autres : “C’est parce qu’il y a un domaine que les personnes peuvent trouver du travail et c’est parce qu’il y a des personnes en situation de handicap qui prennent soin du lieu que celui-ci existe et que des activités culturelles et d’accueil du public peuvent s’y réaliser. C’est une preuve supplémentaire que le modèle du développement durable fait bel et bien partie de notre ADN”.
Magnifique réalisation, admiration de votre travail ainsi pour les personnes handicapées