ZFE : du ras-le-bol au bol d'air ?
[EDITO] Récemment, le gouvernement a fait marche arrière sur les ZFE. “Le dispositif est critiquable mais il a le mérite de traiter ce mal invisible qu’est la pollution de l’air”, nous indique Julie Frêche. La mesure mérite aussi d'être regardée d'un point de vue socio-économique. Qui sera en capacité de pouvoir continuer à circuler en voiture ?
Les premières ZFE, zones à faibles émissions pour les véhicules, ont vu le jour en Europe dans les années 2000, avec des villes pionnières comme Stockholm et Londres. Depuis, leur nombre a considérablement augmenté sur le continent. Des engagements internationaux, dans le cadre des accords de Paris sur le climat (2015), ou nationaux : loi d’orientation des mobilités (2019), loi climat et résilience (2021), l’encadrent. L’objectif ? Pour l’environnement : réduire les émissions de gaz à effet de serre et ralentir le phénomène de réchauffement climatique. Pour la santé humaine : améliorer la qualité de l’air. Chaque année en France, plus de 40 000 décès prématurés sont dûs aux particules fines présentes dans l’air. Pour les oxydes d’azote, cela représente 7000 décès. L’Organisation Mondiale de la Santé a ainsi fixé des seuils réglementaires pour prévenir ces morts évitables. Dans les métropoles concernées par les ZFE, les limites du dioxyde d’azote sont supérieures à 40 μg/m3 d’air. Ce sera 20 μg/m3 en 2030, et 10 μg/m3 en 2035.
L’automobile est-elle la seule responsable de ces émissions ? Certainement pas. Mais en 2022, 43% sont liées au transport routier.
Pour autant, les ZFE ne produisent-elles que des effets – cette fois positifs – sur le climat et la santé ? Non, et c’est pour cela que les détracteurs du dispositif sont nombreux. Dans nos pages, Pierre Chasseray, délégué général et porte-parole de l’association 40 millions d’automobilistes, nous indiquait que la mise en place des ZFE, par l’incitation au remplacement de son véhicule par un véhicule électrique, induit une exclusion sociale : “On a mis une aide en place pour l’achat de véhicules électriques destinés à des gens aisés”.
Au 1er janvier 2023, l’âge moyen du parc automobile français est de 10,8 ans. Cela fait seulement 31,6 % des véhicules roulants avec un classement Crit’Air au moins égal à 3, le minimum requis pour pouvoir continuer à circuler dans les ZFE à partir de janvier 2025. On peut donc s’interroger sur la capacité financière des automobilistes français à pouvoir renouveler leur véhicule d’ici-là. Sachant que les véhicules électriques, encouragés par le gouvernement autant que les métropoles, ont un coût : une citadine électrique vaut en moyenne 35 000 €. Avec le bonus écologique et la prime à la conversion cumulés, les aides peuvent atteindre jusqu’à 13 000 €, hors surprimes pour les ZFE, et éventuelles aides des régions ou métropoles. Malgré ces aides soumises à condition de ressources, la démarche est-elle moins coûteuse qu’un véhicule classique, pour lesquels le marché de l’occasion est bien plus développé ? Surtout, le barème fiscal en vigueur est assez excluant pour les très pauvres et les classes moyennes. Le revenu fiscal de référence doit être supérieur à 15 400 € et inférieur ou égal à 24 900 € par part.
La solution alternative pour des ZFE accessibles à tous ? La conversion éthanol ou GPL, plus propre que l’essence ou le diesel. Sur les petits modèles, l’installation d’un kit E85 représente moins de 1 000 €. Pour le GPL, il faut compter de 1 500 à 2 000 €. Cependant, pour ces dispositifs, il n’y a pas d’aides étatiques. Seulement des initiatives locales, si elles existent. Dans l’Hérault ou dans l’Occitanie, ces aides à la conversion ne sont pas mises en place.
Alors, que penser du système ZFE ? Julie Frêche le résume ainsi : “le dispositif est critiquable, il n’est pas parfait, loin de là. Mais il a le mérite de traiter ce mal invisible qu’est la pollution de l’air”. Ainsi, Montpellier a choisi de poursuivre le dispositif, malgré un assouplissement récent du gouvernement pour la plupart des métropoles.
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