Faits divers — Clermont-l'Hérault

“J’aurais pu éviter les faits” : six hommes jugés coupables de séquestration et de violences à Clermont l’Hérault

Six hommes accusés d’avoir enlevé, séquestré puis violenté un jeune homme de 19 ans sur fond de trafic de drogue à Clermont l’Hérault ont écopé de peines allant de 15 mois à quatre ans de prison ferme.

L’ambiance était électrique dans le box des accusés, tout au long de la journée du vendredi 10 janvier. Six hommes, entre 21 et 35 ans, sont assis côte à côte afin d’être jugés au tribunal de Béziers pour avoir enlevé un jeune homme de 19 ans dans la nuit du 11 au 12 septembre 2024 à Clermont l’Hérault, avant de l’emmener dans une chambre et de le frapper puis de le libérer sur la chaussée au milieu de la nuit. Le tout avec en toile de fond un trafic de stupéfiants dans la petite ville de moins de 10 000 habitants.

Le verdict est tombé tard dans la soirée, après une éprouvante journée de débats et de plaidoiries : les peines vont de 15 mois à quatre ans pour Jordan D. l’instigateur des faits. Alors qu’ils étaient tous en détention préventive, ils ont été placés sous mandat de dépôt. 

“La peine aurait pu être plus lourde” 

Le plus important était le principe d’une condamnation de tous les prévenus pour les faits commis à l’encontre de la victime, et ce malgré leurs dénégations”, a réagi à la sortie de l’audience Mikael D’Alimonte, avocat du plaignant qui s’est constituée partie civile.

La peine aurait pu être plus lourde étant donné les faits reprochés. Je l’explique par la faiblesse du dossier : l’affaire a été jugée en comparution immédiate donc certaines choses n’ont pas pu être vérifiées”, explique Mathieu Montfort, avocat de Sofiane, l’un des prévenus condamné à trois ans de prison.

“Un individu dans le coffre s’extirpe du coffre” 

Tout a commencé l’été dernier, quand Jordan D., 27 ans, s’est fait voler 20 000 euros de stupéfiants dans sa maison à Clermont l’Hérault. Alors qu’il pense avoir identifié le voleur, ou tout du moins un proche de l’auteur, il organise un piège afin d’essayer de retrouver sa marchandise. Trois hommes donnent alors rendez-vous via Snapchat à Jordan L. à Péret pour une fausse transaction où ils se font passer pour des acheteurs. 

Le passager avant va demander à Jordan L. de monter à bord du véhicule pour opérer la transaction. Dès qu’il est monté, le conducteur est parti à vive allure. Un troisième individu dissimulé dans le coffre va s’en extirper pour le serrer par le cou et lui baisser la tête afin qu’il ne repère pas le chemin emprunté”, lit stoïquement la présidente du tribunal en début d’audience.

Jordan L. est emmené dans la maison de Jordan D., enfermé dans une chambre où il est violenté, pendant que ses agresseurs lui demandent de révéler l’endroit où se trouvent les stupéfiants volés. Selon sa déclaration, il reçoit des gifles, un coup de cross de fusil et une cigarette est brûlée sur son épaule. 

Il est libéré vers 2 heures du matin, laissé en caleçon allongé sur le bord de la chaussée. Le jeune homme va être retrouvé, apeuré et traumatisé, par sa famille qui était partie à sa recherche alors que deux témoins de la fausse transaction avait relevé la plaque d’immatriculation du véhicule. 

Début novembre, six hommes sont donc interpellés. Lors d’une perquisition chez Jordan D., des gants coqués, 477 grammes d’herbe ainsi que de la cocaïne et de la résine de cannabis, des couteaux, une batte de baseball, un poing américain et un carnet de compte avec des noms de clients et des quantités de stupéfiants, sont trouvés. 

Des faits “particulièrement graves” 

Pendant toute l’audience, les témoignages se succèdent et se contredisent. Est-ce que les mis en cause portaient une cagoule ? Combien de personnes se trouvaient dans le véhicule dans lequel a été enlevé le jeune homme ? Nassim, qui nie les faits, était-il présent ou est-ce qu’il a été désigné par ses co-prévenus pour protéger un autre homme resté dehors ? Qui a brûlé un mégot de cigarette sur l’épaule de la victime ? Qui est derrière le compte Snapchat utilisé pour fixer le rendez-vous qui était un piège ? 

C’est vrai que j’aurais pu éviter les faits (…) j’ai eu l’idée du rendez-vous, tout vient de moi”, assume Jordan D. L’homme aux cheveux courts et à la barbe de trois jours, une fine doudoune noire sur les épaules, ne veut pas dire qui était là ou pas à son domicile. “Je ne balance personne, ils n’ont qu’à assumer s’ils sont des hommes”, lance-t-il énervé, en se retournant vers ses co-détenus, tandis que son avocate essaie de le calmer à travers la vitre du box des accusés. 

Pour le procureur, la situation est claire : “Jordan D., Nassim et Sofiane ont élaboré la stratégie. Un autre est dans la mise en œuvre de l’opération et les deux derniers se sont greffés au dernier moment. (…) Retenir quelqu’un pendant plus de cinq heures avec des violences… Les faits sont particulièrement graves”, estime le représentant du ministère public, qui a requis jusqu’à six ans de prison pour Jordan D. 

Une audience sous pression 

Quand il entend les réquisitions du procureur, le jeune homme commence à s’énerver, à proférer des menaces et à taper du pied contre le mur du box. “La prochaine fois, vous serez évacué !”, le prévient la présidente du tribunal, tandis que cinq policiers armés entrent dans le box pour faire descendre la pression.

Un peu plus tôt, la magistrate avait déjà dû intervenir alors que le petit frère de Nassim s’était levé pour clamer l’innocence de son aîné, tandis que le procureur posait des questions aux prévenus. “Merci de ne pas me couper la parole”, lui avait lancé un peu plus tôt Nassim, sous le regard médusé de l’audience. 

Même la salle est choquée de la façon dont vous vous adressez au procureur, c’est un ton inapproprié”, le recadre la présidente du tribunal. Nassim, le seul des prévenus habillé d’une chemise blanche tirée à quatre épingles, a tenu à s’excuser. “C’était sur le coup de l’énervement, cela fait deux mois que je suis enfermé et que je ne vois pas ma famille, j’ai un bébé qui va avoir sept mois“, explique le jeune homme de 21 ans qui a finalement écopé de deux ans de prison ferme.

Des fumeurs de joints addictes à l’alcool et la cocaïne 

Tous, sauf Nassim, ont reconnu être consommateurs de cannabis et de cocaïne, certains même d’alcool. À part deux hommes, la plupart a un casier judiciaire fourni, notamment pour usage, détention, offre ou cession de stupéfiants ou pour conduite en état d’ivresse.

Ces jeunes issus des petites villes rurales de l’Hérault, travaillaient pour la plupart, par exemple dans la bâtiment, la maçonnerie et la restauration. Jordan D., qui habitait en colocation avec Sofiane dans une maison de Clermont l’Hérault, a servi pendant cinq ans à l’armée. Des profils peu habituels dans une affaire de stupéfiants où vraisemblablement, de petits trafiquants ont essayé de jouer aux gros bras. 

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