Procès Pissarra : "J’aurais dû écouter ce sentiment au fond de moi", raconte le père d'Amandine, morte affamée
Lors de ce troisième jour d'audience, le père d'Amandine a pris la parole à la barre. C'est un homme rongé par la culpabilité qui explique ne pas avoir saisi les occasions de réagir.
Ce mercredi 22 janvier, au lendemain des aveux de la principale accusée, c’est le témoignage de Frédéric Florès qui a marqué cette matinée d’audience, aux Assises de l’Hérault. Le père de la petite Amandine, affamée et torturée par sa mère Sandrine Pissarra et son compagnon Jean-Michel Cros, a passé plus de deux heures à la barre, en tant que partie civile. “J’aurais du écouter ce sentiment au fond de moi. Je m’en voudrais jusqu’à la fin de ma vie”, a-t-il dit à plusieurs reprises.
“Est-ce que ça aurait pu être un appel au secours ?”
Le couple s’est rencontré en 2003 et s’est séparé en 2010 puis définitivement en 2015. Durant ces années, l’accusée et le policier ont eu trois enfants : Ambre, Amandine et E. Au moment du décès d’Amandine, son père n’en avait pas la garde et ne l’avait pas vu depuis 2017. A la faveur de différentes décisions de justice survenues après 2010, il pouvait les voir puis perdait ses droits. A partir de 2017, “à chaque fois que je venais, je ne pouvais pas les voir. Parfois c’est Amandine qui appelait en disant qu’elle et ses frère et sœur ne voulaient pas me voir, qu’ils ne m’aimaient pas”, raconte-t-il. L’œuvre de Sandrine Pissarra, selon lui, qui manipulait les enfants.
C’est en avril 2020 que Frédéric Florès a parlé à sa fille pour la dernière fois, lors du confinement. “C’est elle qui m’a appelé, ça a été nos retrouvailles, on a parlé pendant une heure. Elle m’a dit que je lui manquais et qu’elle voulait me voir. C’est la dernière fois que j’ai entendu sa voix”. “Est-ce que ça aurait pu être un appel au secours ?”, lui demande le président de la cour. “Avec du recul, oui, je pense”, lâche l’homme dans un sanglot.
“Je crois qu’au fond de moi j’attendais qu’elle me le dise”
Des larmes, ce père rongé par la culpabilité en a versé beaucoup lors de ce témoignage. “J’ai l’impression d’avoir fermé les yeux sur des choses“, admet Frédéric Florès qui avait assisté, durant sa vie commune avec Sandrine Pissarra, à plusieurs scènes de violence. “Une fois quand Ambre était bébé, elle l’a jeté sur un lit, j’ai cru à une dépression post-partum“. Le policier admet aussi avoir vu des punitions sur les premiers enfants de la mère accusée et avoir été lui-même victime de coups et de morsures.
Comment ne pas s’être aperçu qu’Amandine était devenue le souffre douleur de cette femme décrite comme narcissique et perverse par les experts ? Amandine a dénoncé des violences, elle avait parfois des marques de coups visibles. Mais à chaque fois Sandrine Pissarra, que de nombreux témoins appellent une manipulatrice hors-pair, avait réponse à tout. Jusqu’à donner à son ex conjoint un certificat médical expliquant les bleus sur le corps d’Amandine par une maladie. “Est-ce que vous avez interrogé votre fille”, demande le premier magistrat. “Je crois qu’au fond de moi j’attendais qu’elle me le dise”, répond le père. “Ce sentiment de ne pas avoir réagit, y’a une part de moi qui est morte”.