"Un palier, deux toits" : un modèle pionnier d'habitat inclusif à Pézenas
Ce mercredi 8 janvier, l’association « Un palier, deux toits » nous a ouvert ses portes à Pézenas, offrant une vision nouvelle de l’habitat inclusif pour les jeunes adultes touchés par des maladies neuro-évolutives rares.
Ce dispositif unique, qui offre une solution concrète face à des pathologies souvent dévastatrices, a été une occasion également pour Sébastien Frey, président de l’agglomération Hérault Méditerranée, de découvrir ce modèle qui repousse les frontières de l’accompagnement.
L’histoire d’un projet porté par une mère
Véronique Bernard Guérin, directrice et fondatrice de l’association, raconte l’histoire à l’origine de cette initiative. « L’association a été créée en 2018. Je suis maman de deux enfants atteints d’une maladie neurodégénérative génétique, héritée de leur père, décédé à l’âge de 42 ans. Je voulais qu’ils puissent avoir un projet de vie leur permettant de vivre dignement avec cette maladie dégénérative. » Pour elle, l’objectif était clair : permettre à ses enfants de continuer à mener une vie sociale, de participer à des activités stimulantes et de conserver une certaine autonomie, malgré l’évolution de la maladie. « C’est un projet qui devait leur permettre de partager des moments de vie sociale, tout en ayant des activités et des stimulations adaptées pour améliorer leur état. Malheureusement, ma fille est décédée l’été dernier. »
Interview de Véronique Bernard Guérin, directrice et fondatrice de l’association “Un palier, deux toits”
“Ce projet a été une réponse à un besoin“
Répondant à un appel à projet de l’ARS (Agence Régionale de Santé), l’association a pu mettre en place ce dispositif innovant. L’habitat inclusif, jusqu’alors rare pour les maladies neuro-évolutives, existait principalement pour d’autres types de handicaps. Mais pour ces maladies, il était quasiment inexistant. « L’habitat inclusif n’existait pas pour les maladies neuro-évolutives, en tout cas pas pour les jeunes adultes. Ce projet a été une réponse à ce besoin. » En 2024, les difficultés financières se sont toutefois fait sentir. Le modèle associatif, souvent confronté à des moyens limités, peine à trouver des financements pérennes. « Nous avons une convention avec le département, mais c’est difficile de trouver des financements ailleurs. Nous devons aussi compter sur la générosité des donateurs et la recherche de mécènes, car de plus en plus, le secteur associatif souffre de ces manques de moyens. » confie Florence Baconnet-Roy, présidente de l’association, ancienne directrice du Réseau Maladies Rares.
Un financement grâce à la solidarité
Véronique Bernard Guérin revient sur l’histoire de l’acquisition des logements : « On a eu la chance d’acquérir ces logements, qui étaient en cours de construction. Grâce à l’aide d’AG2R et de nombreux donateurs, nous avons pu faire un emprunt pour le reste. Avant cela, nous étions en location dans le parc privé, mais nous avons décidé de développer un second projet qui, malheureusement, n’a pas pu perdurer en raison de difficultés financières liées aux conventions avec le département. »
Un habitat à taille humaine
“Un palier, deux toits” propose un habitat partagé à taille humaine, adapté aux besoins spécifiques des résidents. Cinq adultes jeunes, tous atteints de maladies neuro-évolutives, vivent dans ce dispositif. Le logement est conçu de manière à favoriser l’autonomie tout en offrant un accompagnement constant et des activités stimulantes. Il comprend deux colocations de deux personnes ainsi qu’un appartement dans une résidence voisine. Ces aménagements permettent aux résidents de se retrouver, de partager des moments ensemble et de participer à diverses activités. L’un des aspects remarquable de ce modèle est la mutualisation des moyens, cette approche optimise l’accompagnement personnalisé tout en garantissant la sécurité des résidents. Pour les familles, ce système allège considérablement la charge mentale et permet une relation plus apaisée avec leurs proches. De plus, une chambre d’accueil temporaire permet aux familles de tester ce mode de vie, avant de se décider.
Une vie épanouie malgré la maladie
La volonté de l’association est de permettre aux adultes jeunes atteints de maladies neuro-évolutives de vivre une vie aussi proche que possible d’une vie ordinaire et épanouissante. La mission est de rompre l’isolement, d’accueillir et d’accompagner les malades, tout en leur offrant des stimulations constantes pour ralentir l’évolution des symptômes. L’ambition est également de toucher un plus grand nombre de bénéficiaires et de créer un modèle reproductible. L’association rêve de transmettre son savoir-faire pour aider à l’émergence de lieux similaires, partout en France. Il s’agit aussi de mesurer l’impact de cette initiative et de chercher à améliorer l’existant pour faire face à la demande croissante.
Des maladies neuro-évolutives rares en France
En France, ce sont environ 158 000 personnes qui sont confrontées aux maladies neuro-évolutives rares chez les adultes jeunes, un nombre qui peut sembler important, mais qui reste souvent invisible. Ces pathologies engendrent une perte d’autonomie croissante, une vulnérabilité physique, psychique et cognitive, et causent une grande souffrance tant pour les malades que pour leurs proches. L’isolement est l’une des conséquences les plus dramatiques de ces maladies, et une assistance constante est nécessaire, parfois jusqu’au décès, où les causes principales sont la pneumonie et le suicide. Ce sont des raisons qui renforcent l’urgence d’une prise en charge adaptée, visant à freiner l’isolement, briser l’apathie, et accompagner les malades dans leurs démarches administratives, leur accès aux soins, l’entretien de leur logement… .